Nantes n’oublie pas ses résistants fusillés

2ÈME GUERRE MONDIALERÉSISTANCENANTESJOËL BUSSONRENÉE LOSQAUGUSTE CHAUVINALAIN GARNIER
ALAIN GARNIER
MARDI, 11 FÉVRIER, 2014
L’HUMANITÉ
Le 28 janvier 1943, au palais de justice de Nantes, quarante-deux résistants considérés comme des terroristes font face à un tribunal militaire allemand. Trente-sept sont condamnés à la peine de mort par le conseil de guerre. Leur faute : avoir résisté au nazisme en combattant avec des armes et des explosifs les membres de l’armée allemande et des collaborateurs. C’est le jugement du « procès des 42 », comme l’appelle la presse vichyste et collaborationniste de l’époque, qui titre : « La civilisation occidentale épure ».

En effet, au terme des onze audiences, le verdict tombe, implacable : deux femmes et trois hommes sont déportés, les trente-sept autres résistants seront fusillés sur le terrain du Bêle près de la Beaujoire. Neuf, dès le lendemain, vingt-cinq le 13 février et trois le 7 mai.

Présentés comme des assassins et des bandits au cours de cette parodie de justice, ces ouvriers et intellectuels de la région, ainsi que cinq républicains espagnols, ont surtout rejoint, dès 1941, l’Organisation spéciale du PCF puis les FTP.

En un an et demi, ils commettent ainsi de nombreux sabotages et attentats à Nantes, contre le local du Parti populaire français de Doriot, dans des hôtels fréquentés par l’armée allemande, dans des usines tenues par les occupants nazis, contre des installations ferroviaires, des fils télégraphiques, des ponts roulants…

« II y a eu une guérilla urbaine à Nantes. II n’y a pas cinquante exemples en France de combats armés en ville. Les résistants vivaient dans une semi-clandestinité, ils risquaient leur vie en permanence. Nantes a vraiment été le lieu d’une lutte acharnée. Un hommage officiel a eu lieu pour la première fois à l’occasion du 60e anniversaire, le 13 février 2003, avec les autorités sur le terrain du Bêle », explique Joël Busson, président du comité départemental du souvenir des fusillés de Châteaubriant et de Nantes et de la Résistance en Loire-Inférieure.

Depuis, le collectif n’a pas relâché ses efforts, il a produit une exposition qui retrace la lutte de ces jeunes résistants et un documentaire de vingt minutes comprenant le témoignage des derniers survivants du procès, dont Renée Losq, qui a été déportée, et s’achève sur une lettre d’Auguste Chauvin, l’un des fusillés.

Durant toutes ces années, des cérémonies se sont succédé avec l’inauguration de rues, l’érection d’un monument sur le carré des républicains espagnols dans le cimetière de La Chapelle-Basse-Mer, la tenue de colloques et débats, évocations et soirées ou l’édition de publications… Le 70e anniversaire, l’année dernière, a été un grand moment pour cette mémoire, et à la rentrée 2014 un livre de l’historien Guy Haudebourg sur le « procès des 42 » et celui des « 16 » (1) sortira des presses.

Le 13 février prochain à 17 h 15 à la maison des syndicats à Nantes, devant les plaques en hommage à plus de 110 militants syndicalistes tombés dans la lutte contre l’occupant, le samedi 15 à 11 heures, au terrain du Bêle, et ensuite au cimetière de la Chauvinière, puis l’après-midi à 15 heures à Sainte-Luce-sur-Loire, et dimanche 16 dès 11 heures au cimetière de La Chapelle-Basse-Mer, le comité départemental organise avec son collectif « du procès des 42 et des 16 » de nouvelles cérémonies, celles du 71e anniversaire.

(1) Un second procès se déroule à huis clos l’été 1943, seize nouveaux FTP sont impliqués, ils seront fusillés le 13 aoûtau Bêle ou déportés et guillotinés en Allemagne.