Charles-Michels
MICHELS Charles

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Article issu du dictionnaire biographique https://fusilles-40-44.maitron.fr/ Pour un Maitron des fusillés et exécutés

Charles Michels était le fils de Louise Lecoq, journalière, et de Jean Michels, chaudronnier qui le reconnut et le légitima par mariage, en 1906 à Paris (XXe arr.). Son père malade mourut le 31 décembre 1914, laissant quatre enfants dont Charles était l’aîné. Sa mère, illettrée, devint femme de ménage dans son école, rue du Général-Lassalle (XIIIe arr.). Le dénuement était tel que pour nourrir sa famille, il vola un chou dans un jardin et prétendit qu’on le lui avait donné. Il dut quitter l’école avant le CEP, à onze ans et demi, et chercher du travail pour aider sa mère. Elle déménagea du XIIIe arrondissement pour le XIXe, 20 rue Pradier puis prit, en 1925, une loge au 46 rue des Bois dans le XIXe.

Charles Michels fut embauché chez un grossiste de pommes de terre puis par un marchand de peaux de lapin pour laver les peaux et, à l’âge de treize ans, entra comme apprenti cordonnier chez Dressoir, l’une des plus importantes fabriques de chaussures de la région parisienne. Sportif à la forte carrure, bagarreur, souple, il arrondissait son salaire en disputant des matches de boxe aux « Folies Belleville ». Il en garda des marques physiques qui renforcèrent son côté titi parisien de blond aux cheveux ondulés et à la silhouette athlétique.
Devenu ouvrier spécialisé, sensible peut-être aux souvenirs du meeting du Pré-Saint-Gervais, auquel son père l’avait emmené en mai 1913, manifestation où Jaurès dénonça les menaces de guerre, attentif aux échos de la Révolution russe et aux grèves qui avaient éclaté pendant la Première Guerre mondiale, Charles Michels rallia la lutte syndicale. Délégué de la section syndicale CGT de Dressoir en 1920, il fut bientôt renvoyé mais retrouva du travail aux usines Monteux, autre importante fabrique de chaussures. Il en fut rapidement congédié, toujours en raison de son activité syndicale. Il resta alors quelques mois au chômage puis fut engagé dans une petite usine de chaussures, rue Rébeval (XIXe arr.) où il retrouva une de ses anciennes voisines, Aimée Malagnoux, cordonnière, qu’il épousa peu après, le 24 mars 1923. Ils eurent deux filles, Régine en 1923 et Denise en 1930.

Après son service militaire (1923-1924), Charles Michels, moniteur à la FSGT, adhérent du Parti communiste à partir de 1926 (à l’invitation d’un de ses collègues, Charles Strykman), s’imposa peu à peu comme l’un des responsables syndicaux de la Fédération unitaire des Cuirs et peaux. Il fit la connaissance, en 1927, de Fernand Maurice connu dans le mouvement ouvrier sous le nom de Maurice, de huit ans son aîné, le secrétaire de la fédération avec lequel il se lia d’amitié et qui l’aida à devenir un dirigeant national. Ils devinrent inséparables, passèrent leurs vacances ensemble, étudièrent ensemble. Maurice fit découvrir à « Charlot », le « grand blond », la musique classique des concerts Colonnes.
En 1929, Charles Michels fut élu secrétaire permanent CGTU, à la fois de la Fédération nationale et de l’Union syndicale de la région parisienne des Cuirs et peaux. À ce titre, mais aussi à celui de la FSGT (il appartenait à une équipe de football), Michels participa à une délégation en Union soviétique et fit à son retour des conférences élogieuses. Il s’installa au milieu des années 1930 au 51 rue des Bois (XIXe arr.) dans un appartenant ensoleillé plus adapté à la tuberculose de sa femme.

En 1931, reconduit dans ses fonctions de secrétaire, il devint permanent. Dès lors, il fut délégué à tous les congrès nationaux : à ceux de la CGTU en 1931, 1933 et 1935, à ceux de la CGT en 1936 et 1938 à Nantes. Charles Michels, qui s’était révélé un orateur éloquent, fut présent partout où des ouvriers de sa corporation menaient une grève. En mars 1932, des rapports de police le signalèrent comme dirigeant, avec André Tollet,de la grève des ouvriers en chaussures de Pont-de-l’Arche (Eure). Quelques mois plus tard, en septembre, il fut appréhendé aux abords des usines Monteux pour distribution de tracts. D’autres rapports de police, en mars 1934, l’identifièrent comme propagandiste auprès des grévistes de la manufacture de chaussures Blachon à Romans (Isère) et, en 1935, il fut donné comme l’organisateur de toutes les grèves des Cuirs et peaux, menant notamment celle des chaussures Pillot ou celles de Fougères. Cette année-là, l’unité dans les Cuirs et peaux, dont Michels avait été un des artisans actifs, fut réalisée. Les deux fédérations (CGTU et CGT) fusionnèrent sous le nom de Fédération nationale unifiée dont il devint secrétaire adjoint.

En mai 1935, le Parti communiste demanda à Charles Michels de se présenter aux élections municipales dans le quartier de Javel à Paris (XVe arr.). Il obtint 1 959 voix sur 8 384 votants et 9 319 inscrits. En mai 1936, il brigua un siège aux élections législatives dans le même arrondissement (3e circonscription, Javel-Grenelle) contre le député sortant Boucheron, candidat républicain. Au premier tour, Michels rassembla 3 258 suffrages contre 2 353 au socialiste Marceau Pivert, 1 059 à Louis Duteil (PUP), et 2 883 au radical Alphonse Boucheron sur 11 816 votants et 13 095 inscrits. Il fut élu au second tour avec 6 614 voix contre 3 924 à Boucheron. Membre de deux commissions, celle de l’Hygiène et celle de l’Algérie, des colonies et des pays de protectorat – ce qui lui permit d’effectuer en 1937 une tournée en Afrique du Nord –, Michels profita de la tribune de la Chambre pour faire de nombreuses interventions. Il dénonça ainsi, le 9 décembre 1938, le lock-out de l’aviation, rappela les objectifs de la grève du 30 novembre et réclama, le 20 janvier 1939, l’ouverture de la frontière des Pyrénées.

Réélu secrétaire du syndicat CGT des Cuirs et peaux de la Seine en 1937, Charles Michels présenta au congrès national de la Fédération, qui se tint à Paris les 25-27 mars 1937, un rapport sur le fascisme, la guerre et l’unité internationale et fut désigné comme secrétaire général. Il assuma ces responsabilités jusqu’à la guerre, le congrès des 15-17 avril 1939 l’ayant confirmé dans ses fonctions. Il effectua pour le Parti communiste, en mai 1939, une tournée de propagande dans le Loir-et-Cher en compagnie de Marcel Capron.

Mobilisé en septembre 1939, incorporé au 22e GOA à Vernon (Eure), Charles Michels se rendit le 9 janvier 1940 à la séance d’ouverture de la Chambre des députés où il retrouva, André Mercier, Raymond Guyot et Fernand Grenier. Leur présence provoqua une bagarre et leur expulsion. Ils avaient refusé de se lever pour saluer avec les autres députés « les armées de la République ». Il fut déchu le 21 janvier 1940 de son mandat de député pour appartenance au Parti communiste.

Démobilisé le 20 juillet 1940 à Tarbes, Charles Michels regagna Paris et prit contact avec Jean Catelas qui dirigeait l’activité communiste clandestine dans la région parisienne. Avec Fernand Maurice, il organisa les comités populaires clandestins des Cuirs et peaux. Début octobre, alors qu’il s’apprêtait à passer dans la clandestinité, il fut arrêté. Interné le 5 octobre à Aincourt (Seine-et-Oise), transféré le 5 décembre 1940 à la centrale de Fontevrault-l’Abbaye (Fontevraud, Maine-et-Loire) dont le régime était plus dur, puis le 21 février 1941 à celle de Clairvaux où il fit preuve d’une grande fermeté dans les rapports avec l’administration, il arriva au mois de mai au camp de Choisel à Châteaubriant. Appartenant au comité clandestin du camp, il prépara l’évasion de quatre détenus : Fernand Grenier, Henri Raynaud, Léon Mauvais et Eugène Hénaff, tout en faisant mine dans son courrier d’ignorer cette action. Il organisa tout particulièrement celle de Raynaud le 19 juin 1941. À la suite d’un attentat commis contre la Kommandantur de Nantes, Charles Michels fut le premier prisonnier du camp désigné comme otage et fusillé le 22 octobre 1941 avec vingt-six autres internés presque tous communistes.

Il demeura à ce titre une figure essentielle de cette première exécution en nombre qui en annonçait bien d’autres. Inhumé au Père-Lachaise, Charles Michels est honoré par le nom d’une place du XVe arrondissement de Paris et d’une station de métro. Il obtint la mention « Mort pour la France ».
SOURCES : DAVCC, Caen, B VIII, dossier 2. – RGASPI, 495 270 959 : autobiographie du 27 septembre 1933. – Arch. familiales détenues par sa fille Denise Bailly : lettres d’interné, original de la dernière lettre, papiers personnels, documents administratifs, photographies. – Arch. Jean Maitron, fiche Batal. – Arch. Dép. Seine-Saint-Denis, Fédération nationale des Cuirs et peaux 1889-1985, 48J. – P. Tillard (préf. d’H. Raynaud), Charles Michels, édité par la Fédération des Cuirs et peaux à l’occasion du 10e anniversaire de la fusillade de Châteaubriant, 22 octobre 1951. –Fernand Grenier, C’était ainsi et Ceux de Châteaubriant. – Notice DBMOF par Nathalie Viet-Depaule. – État civil.
Annie PENNETIER

POULMARCH (ou POULMARC’H) Jean, Marie

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Article issu du dictionnaire biographique Pour un Maitron des fusillés et exécutés
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Fils d’un cheminot breton, Guillaume Poulmarch, et de Marie Rucard, fixés à Dreux (Eure-et-Loir), Jean Poulmarch obtint son brevet élémentaire puis entra un temps aux chemins de fer. Il adhéra tout jeune à la Confédération générale du travail unitaire (CGTU) et aux Jeunesses communistes. À partir de 1933, il fit un séjour de treize mois en Union soviétique. En septembre 1935, il représentait les « jeunes syndiqués » au VIIIe congrès de la CGTU qui se tint à Issy-les-Moulineaux (Seine, Hauts-de-Seine) ; lors de ce congrès, il fut élu à la commission exécutive.
Marié à Laurence Harel, il eut un fils, Claude, né en septembre 1935.
En 1936, il devint membre du comité central des Jeunesses communistes. Deux ans plus tard, il accéda aux fonctions de secrétaire général du syndicat CGT des produits chimiques de la région parisienne, puis devint membre de la commission exécutive de la Fédération CGT de la chimie. Il fut membre du Conseil national économique de 1936 à 1940 (13e, devenue 15e section professionnelle – industries chimiques). Il avait été élu membre de la commission exécutive de l’Union des syndicats de la région parisienne en 1937 et entra à la commission administrative de la CGT en 1938. Il fut l’un des délégués de la Fédération des produits chimiques au XXVe congrès national de la CGT, qui se tint du 14 au 17 novembre 1938.
Mobilisé en 1939 à Constantine (Algérie), démobilisé en septembre 1940, il se rendit à Dreux voir sa famille, puis à Paris, où il milita clandestinement pour le Parti communiste. Arrêté par un inspecteur de la police française, le 5 octobre 1940 à son domicile d’Ivry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne) situé 40 rue Marat, il fut interné à Aincourt (Seine-et-Oise, Val-d’Oise) d’octobre à décembre 1940, puis emprisonné à Fontevrault-l’Abbaye (Fontevraud, Maine-et-Loire) jusqu’en janvier, à Clairvaux (Aube) jusqu’en mai et enfin à Châteaubriant, où il fut dirigé le 15 mai 1941. Jean Poulmarch a été fusillé comme otage le 22 octobre 1941, à la Sablière, avec 27 autres otages.
La mention « Mort pour la France » fut ajoutée à son acte de décès en janvier 1951. Le titre d’Interné Politique (IP) lui fut attribué, mais celui d’Interné Résistant (IR) fut refusé, en avril 1955 ; sa femme adressa un recours gracieux contre cette décision le 6 juin.
Son nom figure sur neuf plaques ou monuments commémoratifs, à Dreux, Châteaubriant, Nantes « Aux 50 otages », Les Lilas, Bagneux et Montreuil. Une rue du Petit-Ivry, à Ivry-sur-Seine, porte également son nom ainsi qu’une rue de Paris Xe arr. La crêche départementale d’Ivry porte le nom de Jean-Marie Poulmarch
Sa femme, Laurence, poursuivit son action à la Fédération CGT des produits chimiques et présenta le rapport féminin au congrès de mai 1948.
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Dernière lettre

Jean Poulmarch à son épouse

Châteaubriant, camp de Choisel (Loire-Inférieure)

22 octobre 1941

Châteaubriant, le 22 octobre 1941

Ma petite Lolo chérie,

Je m’excuse de la peine immense que je vais te causer : je vais mourir. Otage des Allemands, dans quelques minutes, dans quelques heures au maximum, je vais être fusillé. Tu verras, hélas, dans la presse, la longue liste des copains qui, innocents comme moi, vont donner bêtement leur vie.

Du courage, j’en ai à revendre ! Mes amis aussi sont admirables devant la mort. C’est surtout à toi que je veux m’adresser pour les tourments, la douleur infinie que cette nouvelle va te causer.

Sois forte, chérie. Tu es jeune encore, ne te laisse pas sombrer dans la tristesse et le découragement. Refais ta vie en gardant au coeur le souvenir impérissable de celui qui t’a aimée jusqu’à son dernier souffle. Élève notre fils chéri dans l’esprit qui fut celui de toute ma vie, qu’il devienne un homme libre, épris de justice, attaché à défense des faibles, ce sera la meilleure vengeance.

Console mes parents chéris, ma maman et mon papa que j’ai aimés de mon mieux. Qu’ils soient forts devant l’adversité. Embrasse-les et : mets tout ton cœur.

Pauvre Marguerite, pauvre Jeanne, je regrette le chagrin que je leur causer. Je les aimais bien et elles me le rendaient au mieux.