Né le 2 août 1914 à Paris (VIIe arr.), fusillé par condamnation le 2 septembre 1944 à Saint-Nazaire, poche de Saint-Nazaire (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique) ; professeur agrégé de physique ; militant communiste ; résistant FTPF.
Fils de Constantin de Neyman, ingénieur chimiste et de Rose Majerczak, Jean, Casimir de Neyman naquit le jour de la mobilisation générale de la guerre de 1914, dans une famille polonaise aisée composée de trois enfants, un frère André et une soeur jumelle Marie, domiciliée 15 rue du Bac à Paris VIIe arr.
Il fut un brillant élève au lycée Pasteur de Neuilly-sur-Seine (Seine, Hauts-de-Seine), obtenant le second prix de physique au concours général en 1932 et parlant couramment allemand et anglais. Ses qualités de bricoleur en faisait un excellent réparateur d’appareils ménagers familiaux. Après deux années de préparation au lycée Janson-de-Sailly à Paris XVIe arr., il rata de justesse l’admission à l’École normale supérieure mais obtint une bourse d’État pour la faculté de Strasbourg (Bas-Rhin) en 1934.
Il adhéra alors au Parti communiste français (PCF) et devint membre de la cellule de langue française de Strasbourg, rédigeant et vendant le bulletin Le prolo de la Bruche. Il envoyait des colis aux antinazis emprisonnés en Allemagne et, pour faire libérer une jeune Allemande, contracta un mariage blanc avec elle. Les parents de Jean hébergèrent Nathalie Ernestine Vogel, professeur de physique, avant qu’elle ne divorce.
Reçu à l’agrégation en 1937, il fut nommé au lycée Claude Fauriel à Saint-Étienne (Loire). Au cours de l’année scolaire 1938-1939, il participa à la création de l’Union des étudiants communistes, dont la conférence constitutive se tint les 1er et 2 avril 1939, et y eut des responsabilités.
Lors de la déclaration de guerre, en septembre 1939, très myope, il fut mobilisé et affecté à un laboratoire de Paris (où l’on vérifiait la nourriture pour l’Armée) qui, lors de la débâcle, se replia au sud.
Démobilisé, Jean de Neyman, en raison d’une loi de Vichy interdisant la fonction publique aux Français d’origine étrangère – ses parents étaient Polonais –, dut quitter l’enseignement public. Cependant, ce fait est étonnant car né en France d’un père naturalisé en 1912 (donc avant 1927) le décret-loi du 10 août 1940 ne s’appliquait pas à lui. Il entra alors comme professeur au cours secondaire privé « Le Cid » à La Baule (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique) et mena une intense propagande anti-allemande dans les milieux qu’il fréquentait puis réussit à entrer en contact avec les résistants communistes nazairiens.
En mai ou juin 1944, il rentra dans la clandestinité et, avec son groupe de Francs-tireurs et partisans, basé dans la ferme de Madame et Monsieur Joseph Gergaud à Kermichel en Saint-Molf au nord de Guérande, avec entre autres Jean Mercy et Bernard Cabasson qui avait tué un soldat allemand. Ils multiplièrent les actions de guérilla contre l’ennemi, capture d’équipements et d’armes, sabotages de transformateurs électriques et coupures de câbles, chasse aux Géorgiens de la Wehrmacht pilleurs de fermes, ainsi que la désertion de travailleurs forcés polonais et de marins allemands. Début août, deux marins allemands déserteurs se joignirent au groupe de résistants et participèrent à quelques actions mais le 17 août 1944, non loin de la ferme refuge des Gergaud alors qu’ils sortirent en plein jour, ils furent surpris par une patrouille allemande ; l’un réussit à s’échapper tandis que l’autre le déserteur tchèque de la Kriegsmarine, Gerhardt, qu’il avait hébergé, fut arrêté. Jean de Neyman essaya de le secourir en discutant avec les soldats mais il fut arrêté à son tour et tous deux conduits au château d’Heinlex à Saint-Nazaire puis au camp Franco de Gron. Plusieurs membres de son équipe furent appréhendés, Mercy et Gergaud dont la ferme de Kermichel fut pillée, ainsi que le capitaine David et le gendarme maritime Breton, soupçonnés d’avoir transporté des membres du groupe.
Jean de Neyman réussit à innocenter ses camarades en prenant sur lui toutes les responsabilités. Il fut condamné à mort le 25 août 1944 au camp de la Marine Endrass (autre appellation du camp de Beauregard, situé à l’Immaculée à St Nazaire),
par un conseil de guerre allemand, ou le tribunal de la Luftwaffe (DAVCC) avec Gerhardt et Joseph Gergaud dont la peine de ce dernier fut commuée en deux ans de prison et 45 jours d’internement à l’école de Méan. Jean de Neyman avait assuré sa défense avec un courage qui impressionna l’ennemi mais son pourvoi auprès de la Kommandantur de Saint-Nazaire fut rejeté. Pendant les quelques jours de sa détention, il écrivit un article de physique cinétique.
Jean de Neyman a été fusillé le 2 septembre 1944 « après avoir dégusté l’amusante et flatteuse ironie du sort qui [le faisait] l’un des derniers fusillés français de cette guerre » ainsi qu’il l’écrivit dans sa dernière lettre codée, transcrite et conservée au Musée de la Résistance nationale de Champigny-sur-Marne avec des objets lui ayant appartenu.
La poche de Saint-Nazaire assiégée capitula le 11 mai 1945.
Reconnu Mort pour la France le 5 novembre 1946, un décret du 24 avril 1946 publié au Journal officiel du 17 mai 1946 lui attribua la Médaille de la Résistance avec rosette à titre posthume.
En Loire-Atlantique, La Baule, Saint-Nazaire (boulevard et cellule communiste), Trignac et Montoir-de-Bretagne ainsi qu’à Paris, des espaces publics honorent la mémoire de Jean de Neyman. Son nom est également gravé sur la plaque commémorative du lycée Claude Fauriel de Saint-Etienne. Tous les ans, autour de la date du 2 septembre, sa mémoire est honorée devant la stèle érigée en son honneur à l’endroit où il a été fusillé.
La tombe de Jean de Neyman se trouve à Saint-Nazaire dans le cimetière de Toutes-Aides.
Son frère André de Neyman, également résistant, dans une lettre à la principale du collège Jean de Neyman, datée du 12 septembre 1994 expliquait ce code mais aussi la signification de « fils brouillés » : « Jean s’était fait confectionner des clefs lui permettant d’entrer dans les transformateurs des lignes électriques à haute-tension alimentant la base maritime allemande. S’y introduisant, sans les couper, il intervertissait extérieurement les condensateurs pour provoquer des pannes (par chute de tension, ou par surtension) ; deux ou trois heures après, il rétablissait les circuits ; l’état major allemand n’a jamais compris ce qui s’était passé, donc ne prenait pas les sanctions contre la population habituelles en cas de sabotage ». Quant au « mot fusillés doit être compris « abattus par armes à feu » et qu’il ne s’applique pas aux prisonniers allemands faits par son groupe ».
Nénette est le surnom de sa sœur jumelle, Marie de Neyman peut-être influencée par sa tante, le Dr Dina Majerczak, élève du cours de microbiologie de l’Institut Pasteur (1901-1902) elle entreprit dans les années 30 des études de médecine à Paris.
SOURCES : DAVCC, Caen. – Arch.mun. Nantes, Fonds Luce . — Arch. dép. Loire-Atlantique, 305 J 3 . — Clarté, 13 septembre 1947. – Jean de Neyman, brochure de la cellule G. Môquet de Saint-Nazaire, 1972. – Maxime, Raconte, camarade, Saint-Nazaire, 1974. – « Collection Patrice Morel – Fonds Dominique De Neyman » et notes de Patrice Morel. – Guy Krivopissko, La vie à en mourir, Tallandier, 2006 p. 299 à 307. — Cahier n°2 de l’AREMORS Association de recherches et d’études du mouvement ouvrier de la région de Saint-Nazaire. — Ouest France, édition Saint-Nazaire, 11 mai 1995. — Jacques Varin, Les étudiants communistes, dans Matériaux pour l’histoire de notre temps, n°74 avril-juin 2004 p.38 — Notes d’Annie Pennetier.— Note de Michel Mahé.
Guy Haudebourg, Guy Krivopissko, Annie Pennetier