Jean-Casimir de Neyman est né à Paris (VIIe), le 2 août 1914, de parents polonais. Sous le gouvernement de Pétain et ses lois de Vichy, Jean quitte l’enseignement public et entre comme professeur au cours secondaire privé « Le Cid » à La Baule.
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Il ne supporte pas l’humiliant asservissement et ne reste pas le témoin docile de tant de monstruosités commises par le fascisme.
Il entre résolument dans la Résistance. Il a mesuré les risques de ce combat inégal et périlleux.
Il écrit à ses parents :
« Parmi tous les risques, j’ai l’intention de prendre mes responsabilités aussi clairement que ma conscience m’en donnera les moyens. Je voudrais que vous – (ceux qui survivront) – sachiez vous consoler de ma perte, car je me considère comme un élément, un petit chaînon dans l’évolution de notre monde, et puisque nous sommes dans la période du gros travail, et qu’il doit y avoir d’innombrables chaînons de brisés et d’usés, peu importe au total qu’ils le soient de façon rationnelle, individuelle… »
N’ayant pu trouver au début, le contact avec un groupe de résistants organisés, il mène une propagande intense contre l’occupant dans les milieux qu’il fréquente. Il devient un des animateurs de la Résistance dans la région.
Deux résistants ayant tiré sur des soldats allemands, la Kommandantur prend dix otages et annonce qu’ils seront fusillés dans les 48 heures si les coupables ne se dénoncent pas.
Jean apporte son aide aux deux résistants pour qu’ils puissent fuir et rédige une lettre de menace de la part d’un groupe de nombreux résistants, décidé à user de représailles. En cas d’assassinat des otages, le chef de la Kommandantur serait exécuté. Les résistants tireraient sur tout soldat sortant de la ville.
Monté sur un vélo militaire allemand, habillé en soldat allemand, il va lui-même porter cette lettre à la Kommandantur. Il parle parfaitement allemand. Il exige que le message, très urgent soit remis le soir même.
Le stratagème réussit, l’audace est récompensée, les otages libérés.
En mai 1944, il rentre dans la clandestinité et constitue une équipe dont le lieu de résidence sera la ferme de Joseph Gergaug à Kermichel à Saint-Molf.
Le débarquement allié au mois de juin et les lourdes défaites allemandes sur le front soviétique aiguisent les espoirs. La lutte s’intensifie.
Cette équipe comprend outre Jean et Joseph, Bernard Cabasson, Jean Mercy, Jean et Pierre Leguen et quelques autres, ainsi qu’un déserteur de nationalité tchèque, Gerhardt enrôlé dans la Wehrmacht.
L’activité du groupe est importante : actions de guérillas contre les éléments isolés, capture d’équipements et d’armes, coupures et ruptures de câbles électriques et téléphoniques, sabotages de transformateurs et d’ouvrages militaires, destruction et désamorçage de mines, chasse aux Géorgiens pilleurs de fermes, etc.
En plein jour ils attaquent le poste allemand de Pont d’Armes, un soldat est tué par Cabasson.
Début août, deux marins allemands déserteurs se joignent à eux et participent à quelques actions.
Le 17 août, non loin de la ferme, les deux marins sont surpris par une patrouille allemande. L’un s’enfuit mais l’autre est capturé. Jean de Neyman essaie de le secourir en discutant avec les soldats mais il est arrêté à son tour.
Les deux hommes sont emmenés au château d’Heinlex à Saint-Nazaire.
Torturé avant d’être fusillé, le déserteur allemand Gerhart dénonce ceux qui l’ont accueilli.
A leur tour, Gergaud et Mercy sont arrêtés et la ferme de Kermichel est pillée. Ils rejoignent Jean à Heinlex où on les laisse trois jours sans manger avant de les transférer au camp Franco à Gron. Sont également arrêtés le Capitaine David et le premier maître Breton (gendarme maritime) soupçonnés d’avoir transporté des membres du groupe.
Jean réussit à innocenter ses camarades de lutte en prenant sur lui toutes les responsabilités.
Il est condamné à mort le 25 août 1944 au château d’Heinlex, après s’être défendu lui-même avec un courage et une noblesse qui impressionnèrent les Allemands eux-mêmes.
Il signe son pourvoi (qui est rejeté) auprès de l’officier allemand commandant la place de Saint-Nazaire.
Il sera fusillé le 2 septembre 1944 au château d’Heinlex ; le dernier de Loire-Inférieure, voire de France !
Jean et la politique
Il s’inscrit au Parti Communiste dès 1934 et dans les mouvements antifascistes. Il devient membre de la cellule de langue française du P.C.F. de Strasbourg. Les habitants de la région parlent alsacien sauf dans la vallée de la Bruche où l’on parle français. Avec ses camarades, Jean rédige « Le prolo de la Bruche ». Chaque dimanche, il part à vélo pour les vendre. De porte à porte il fait de la propagande. Il ne rentre que tard le soir, sa lampe électrique sur son vélo.
Au début de l’année scolaire 1938-1939 est créée une Union des étudiants communistes de France (UEC), organisation autonome, affiliée à la Fédération des jeunesses communistes.
La jeune organisation tint sa première conférence nationale constitutive les 1er et 2 avril 1939.
Des sections existent dans les principales villes universitaires dont Strasbourg. Jean de Neyman y aura des responsabilités.
Jean militaire
Mobilisé en 1939, il est affecté, étant très myope, dans un laboratoire à Paris où l’on vérifie la nourriture pour l’armée.
Jean, soldat, et son bracelet d’identité militaire
Il est destitué en 1940 sous le gouvernement de Vichy, parce que fils d’étranger. Le laboratoire est transféré en zone libre.
Jean, chercheur jusqu’au bout !
Ainsi, avec douze autres, en prison, pendant les quelques jours qui ont précédé son exécution, Jean de Neyman écrit un article de physique. Par une méthode ingénieuse de théorie cinétique classique, l’auteur calcule la probabilité pour que l’une des deux molécules supposées élastiques et sphériques qui se heurtent, prenne après le choc une vitesse supérieure à celle de la plus rapide avant le choc.
Son œuvre scientifique et pédagogique aura donc été tragiquement interrompue aussitôt que commencée.
Sa dernière lettre
Lire sa dernière lettre
Jean, honoré !
Un décret du 24 avril 1946, publié au journal officiel en date du 17 mai 1946 attribue à Jean, à titre posthume, la Médaille de la Résistance avec « Rosette ».
Commémoration par le Comité du souvenir de Loire-Atlantique et le Parti communiste français de Saint-Nazaire à l’emplacement de la stèle de Jean. (Photo Morel P.)
Tous les ans, autour de la date du 2 septembre, sa mémoire est honorée devant la stèle érigée en son honneur à l’endroit où il a été fusillé.
Voir aussi : Inauguration du boulevard Jean de Neyman à Saint-Nazaire le 28/02/2015.