CIMETIERE LA CHAPELLE BASSE MER 17 FEVRIER 2013

C_b_M_le_17_02_2013.tif
Carlos Fernandez , Hubert Doucet et Pascal Barras, Manuel Duran et

Monsieur le Maire de La Chapelle Basse-Mer,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs les membres des familles de nos résistants espagnols,
Mesdames et Messieurs les représentants des Associations, Syndicales et Politiques et des Associations des Anciens Combattants,
Chers Amis,
Je veux tout d’abord remercier le Comité Départemental du Souvenir des Fusillés de Châteaubriant et Nantes et de la Résistance en Loire Inférieure, de donner l’occasion à l’ACER, -les Amis des Combattants en Espagne Républicaine- association héritière de l’AVER l’Amicale des combattants volontaires en Espagne Républicaine, plus connus sous le terme d’anciens Brigadistes. Merci de nous donner la parole lors de cette commémoration du 70 ème anniversaire du procès des 42 et plus spécialement aujourd’hui, pour évoquer la mémoire des résistants espagnols, résistants sur le sol de France, et qui ne faisaient que continuer le combat commencé, quelques années plus tôt contre le fascisme et la liberté en Espagne Républicaine.
Modestement, l’ACER peut dire que nous sommes les héritiers d’hommes qui ont forgé de par leur engagement, au péril de leur vie une histoire commune, une histoire partagée, avec les résistants espagnols.
Le coup d’état du général Franco le 18 juillet 1936, contre la jeune République Espagnole, et son agression par les futures forces de l’axe , l’Italie Fasciste de Mussolini, l’Allemagne Nazi de Hitler, le Portugal de Salazar qui apporta d’énorme moyen logistiques, et d’autres contingents plus petits, comme des irlandais et des polonais, des russes blancs, sans compter sur les troupes de choc composés par les marocains, toutes ses forces n’avaient qu’un seul objectif, combattre la démocratie, restaurer une gouvernance aux mains des grands propriétaires.

En Espagne et de par le monde, des femmes et des hommes se sont soulevés et ont essayé au péril de leur vie de repousser ce coup d’état des factieux, de défendre les valeurs de la démocratie, de la liberté, de combattre le fascisme international. Dès le 18 juillet des démocrates étrangers présent à Barcelone pour participer aux Olympiades, participèrent à la défense de la République et contribuèrent ainsi à mettre avec le peuple catalan hors d’état de nuire les troupes rebelles.
L’agression de la République espagnole sera l’occasion pour ces jeunes révolutionnaires de prendre une part active au combat contre le fascisme et ils s’y engageront corps et âme.
Dans les Brigades Internationales dès le mois d’octobre,  ils participeront aux côtés de l’armée républicaine espagnole comme troupes de choc dans  toutes les grandes batailles pour sauver la République, ils seront reconnus pour leur courage au combat, leur moral combatif, leur conscience politique élevée. Si les volontaires français sont de loin les plus nombreux, il y avait également 52 autres nationalités.
 Benédicto, Basilio, Alfredo, Ernesto, Miguel, vous avez croisé ces hommes ! ces internationaux, venus de tous les quatre coins du monde pour vous aider, pour combattre avec vous la bête immonde.
Comme vous ! des milliers ne sont pas revenus chez eux, certains sont enterrés au creux d’une tombe sans que leurs familles ne sachent ce qu’ils sont devenus, d’autres restent portés disparus.
Vous avez avec eux, connu la défaite républicaine, l’internement dans les camps français dans des conditions inhumaines, avec les internationaux qui ne pouvaient plus rentrer chez eux, allemand, Italiens, Polonais.
Vous avez avec eux, connu la déroute de l’armée française et l’entrée de l’armée allemande à Paris,  mais votre détermination demeura intacte, comme celle des internationaux.
Vous connaissiez avec eux, le fascisme et ses méthodes, et vous saviez qu’il n’y avait pas d’autre choix que de l’affronter malgré l’état de débâcle matérielle et morale de la France en 1940.
Les anciens des BI et vous les Espagnols exilés de l’armée républicaine vous vous êtes retrouvés nombreux pour poursuivre le combat antifasciste sur le sol français.
 

Vous avez été parmi les premiers, aux côtés de militants politiques et syndicaux,   à tenir bon dans la tourmente, à ne pas céder au défaitisme, et à commencer à s’organiser.
Vous tous, les anciens d’Espagne, revenus ou exilés ou repliés en France vous avez compté parmi les pionniers, parmi les instructeurs expérimentés des premiers temps de la lutte armée, de la guérilla urbaine, des maquis.
N’oublions pas, que les Résistants Espagnols, ont participé à la libération de nombreux départements dont l’Ariège, les Basses-Pyrénées, le Gers, le Tarn et les Pyrénées-Orientales. Les Espagnols étaient aussi présents dans les grandes concentrations de résistants : le Vercors, le Plateau des Glières, le Mont Mouchet.   
Et pourtant, vous les espagnols, avant Pétain et le désastre de 40, aviez été catalogués par la 3ème République moribonde, comme « étrangers indésirables ».
Comme « indésirables », certains porterons le triangle bleu dans les funestes camps nazis.
Comme « indésirables » beaucoup sombreront dans l’oubli de la libération.
Ici, il a fallu la volonté des élus de la Chapelle Basse Mer et le courage et l’engagement de certaines personnes au sein du « Collectif du procès des 42 » qui ont réussi avec patience à faire sortir de l’oubli nos résistants espagnols, retrouver leur familles et les honorer maintenant depuis 10 ans.

Nous sommes, aujourd’hui des passeurs de mémoire, et chaque génération a sa propre responsabilité pour que ces histoires exemplaires de la Résistance ne tombent pas dans l’oubli, l’indifférence, ou même la récupération idéologique. Responsables politiques, enseignants, associations mémorielles, nous avons un devoir de mémoire pour faire  connaître et vivre au présent les valeurs portées par ces combattants antifacistes, par ces combattants de la liberté.
 Notre jeunesse, quoiqu’on en dise, peut s’y intéresser si la filiation avec ce qu’elle vit aujourd’hui est faite, si on va à sa rencontre pour lui parler de ces combattants en travaillant les formes du récit pour mieux les toucher.  Parlons du procès des 42, communiquons autour de cet évènement, creusons ce sillon, il est fécond car à travers le parcours de ces hommes, Français et étrangers, bien des choses peuvent parler aux jeunes générations.

Ce qu’elles vivent aujourd’hui, la précarité sociale, l’injustice, la montée de l’intolérance et des violences, la jeunesse des années 30 les a aussi connues. La montée du populisme, la recherche du bouc-émissaire comme solution aux difficultés des peuples restent malheureusement de vieilles  recettes toujours d’actualité.
Notre vieille Europe n’est pas à l’abri d’une grave rechute de l’intolérance et du conservatisme, et ses instances institutionnelles ont des réactions bien molles devant les résurgences du fascisme en Hongrie et aux Pays-Bas, alors qu’elles ne trouvent pas de mots assez durs pour fustiger la population grecque, victime d’une régression sociale impitoyable.
Certains discours de la droite française sur la famille, le travail, les étrangers ont des relents pétainistes.
 Si les conditions historiques ne sont jamais identiques, la vigilance s’impose et nous devons la faire absolument partager.
 Pour être efficaces dans ce combat difficile, les jeunes générations doivent connaître leur passé si l’on veut que, nourries de l’expérience de leurs aînés, elles  inventent des formes inédites de lutte dans le combat  incessant pour le progrès social et la démocratie.