Le 27 janvier 1945, Auschwitz
L’Armée rouge, qui avait découvert le 23 juillet 1944 près de la ville polonaise de Lublin, le camp de Majdanek, vidé de ses occupants tués à la mitrailleuse ou dans l’incendie de leurs baraques, arrivent à Auschwitz. Le monde découvre l’horreur du crime de masse le plus monstrueux de toute l’histoire humaine: des millions de morts et d’abord 6 millions de juifs, dont les nazis ont décidé l’ élimination totale, parce qu’ils étaient juifs, dans le cadre de « la solution finale » planifiée froidement en 1942, lors d’une conférence secrète à Wannsee.
Avec l’extraordinaire complexe concentrationnaire, industriel et d’extermination d’Auschwitz- Birkenau, la réalité se révèle, qui va être confirmée à l’avancée des Soviétiques et des Alliés, par la découverte de centaines de camps, partout sur le territoire du Reich. Et la systématisation de l’horreur à une échelle sans précédent, de l’extermination, l’usure jusqu’au bout de la force de travail, la torture, les expérimentations « médicales » monstrueuses.
Du 4 au 11 février à Yalta: quelle organisation du monde ?
La photo est connue: côte à côte Churchill, Roosevelt, et Staline, au palais de Livadia, ancienne résidence du tsar Nicolas II en Crimée, au bord de la mer Noire. L’Armée rouge est à moins de 100 km de Berlin, les Occidentaux en sont à 500 km, mais la victoire est en vue. Il s’agit donc de discuter de la paix. Partage du monde ? En fait, il s’agit de procéder à un état des lieux reflétant les rapports de forces dans une Europe exsangue, où les institutions politiques sont défaites et en même temps de tenter de bâtir les conditions d’une paix durable. Certes, les arrière-pensées ne manquent pas. Staline se méfie des Alliés occidentaux qui n’ont cessé de retarder l’ouverture d’un second front à l’Ouest, jusqu’au 6 juin 1944. Surtout, il n’entend pas brader l’avancée de l’ Armée rouge et le prix du sang versé par 27 millions de soviétiques. Churchill n’entend rien céder sur la Pologne, pas plus que sur ses intérêts en Grèce. Roosevelt envisage une aide économique en faveur de ses alliés occidentaux, mais également de l’Union soviétique pour leur reconstruction et comme moyen de contrôle. Mais, les trois vainqueurs sont provisoirement d’accord sur le maintien d’une grande alliance d’après-guerre afin d’empêcher tout nouvel affrontement et de garantir la paix mondiale. Roosevelt propose de remplacer la Société des nations par une nouvelle organisation internationale: c’est l’avant-projet de l’ONU.
8 mai 1945, la capitulation sans conditions
Autre photo célèbre: celle d’un soldat soviétique plantant le drapeau rouge au sommet du Reichstag, le parlement allemand. Le Reich qui devait durer mille ans a sombré dans le chaos. Hitler s’est suicidé dans son bunker. Depuis des jours, l’artillerie soviétique pilonne Berlin. La vérité oblige à dire que la photo a été posée et retouchée, mais sa puissance symbolique et historique est très forte. 50 millions de morts, dont 27 millions pour la seule URSS, 6 millions de juifs exterminés, la sauvagerie de la Gestapo, des SS, les exactions des milices. L’humanité se réveille de l’épouvantable cauchemar. Deux ans plus tôt, les Alliés avaient décidé que la capitulation de l’Allemagne, de l’Italie et du Japon serait sans conditions. Le 7 mai, à 1h 30, à Reims, le général Jodl face aux représentants des quatre puissances (Etats-Unis, Angleterre, URSS, France) signe un document qui met fin à la guerre. Mais pour les Soviétiques, c’est un document provisoire, selon un protocole réglé par les seuls Alliés occidentaux. Ils veulent une capitulation à Berlin, en bonne et due forme. Elle est organisée par le maréchal Joukov, chef de l’ Armée rouge, en présence du maréchal anglais Tedder, du général Spaatz de l’US Air Force, et du général de Lattre de Tassigny. Le 8 mai à 0 h 06, le maréchal Keitel paraphe le document final. Dans la journée, c’est l’explosion de joie dans le monde, mais le Japon est encore en guerre.
Le 6 août 1945, « l’Eclair »
Si la guerre est finie en Europe, les Etats-Unis font toujours face à la résistance acharnée du Japon et à l’obstination de la clique militaire qui entoure l’empereur. L’URSS, comme promis aux Américains, attaque la Mandchourie mettant en déroute les divisions japonaises qui lui font face. La première bombe atomique de l’histoire a explosé quelques semaines plus tôt à Los Alamos, dans le désert du Nouveau Mexique. Pour le président Truman, les conditions sont réunies pour une expérimentation « in vivo » et une démonstration de force.
Le 6 août, à 8 h 15, le bombardier Enola Gay lâche Little Boy, qui explose à 600 mètres au-dessus de la ville d’Hiroshima. Le souffle balaie tout. « L’Eclair », comme l’ont appelé les Japonais, imprime les ombres sur les murs. 70 000 à 80 000 personnes sont tuées sur le coup, les survivants errent dans les ruines. 140 000 personnes au total vont périr. Le 9 août, Fatman, au plutonium cette fois, est lâché sur Nagasaki. La bombe fera 70 000 morts. Le 15 août, le Japon capitule. Une idée reçue veut que les deux bombes aient mis fin à la guerre. C’est très discutable. Les Américains avaient la maîtrise du ciel, le Japon ne pouvait plus tenir.
20 novembre 1945 : Nuremberg
Haut lieu des cérémonies du Reich, Nuremberg a été choisi comme siège du tribunal international devant lequel comparaissent 21 dignitaires nazis. Composé des juges des puissances alliées, il va durer plus d’un an, jusqu’au 1er octobre 1946. La décision a été prise très vite. Le 8 août 1945, un traité est signé par les gouvernements des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne, de l’URSS et de la France pour organiser ce tribunal où les accusés devront répondre de complot, crimes contre la paix, crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Ce dernier chef d’inculpation est une innovation juridique. Tous les accusés plaident non coupables et affichent leur mépris. La projection de films tournés à la libération des camps et des témoignages dont celui de Marie-Claude Vaillant-Couturier, viennent à bout des dénégations des accusés. Douze d’entre eux seront condamnés à mort par pendaison: Martin Bormann,, Hans Franck, Wilhelm Frick, Alfred Jodl, Ernst Kaltenbrunner, Wilhelm Keitel, Joachim von Ribbentrop, Alfred Rosenberg, Fritz Sauckel, Arthur Seyss-Inquart, Julius Streicher et Hermann Göring (qui parviendra à se suicider avant l’exécution de la sentence).
26 juin 1945: la Charte de l’ONU
La Société des Nations, créée après la Première Guerre mondiale avait été incapable de contrer la montée des fascismes en Espagne, en Italie et en Allemagne. Dès 1941, Churchill et Roosevelt s’étaient prononcés dans une Charte de l’Atlantique, pour un système de sécurité générale. Quelques mois plus tard, 26 pays dont l’URSS affichent leur volonté de vaincre dans le cadre d’une déclaration des « Nations unies ». La France vichyste n’est pas du nombre, mais la France libre non plus, Roosevelt considérant qu’elle ne peut être considérée comme un Etat. Elle ne pourra signer que le 1er janvier 1945.
Le 25 avril 1945, s’ouvre à San Francisco la conférence qui se conclura le 25 juin 1945, par la création de l’Organisation des Nations Unies et l’adoption de sa Charte, signée le lendemain, 26 juin par 50 pays. Elle stipule que tous les Etats membres y siègent à égalité pour formuler des recommandations, mais c’est son Conseil de sécurité de onze membres qui est habilité à prendre les décisions, y compris le recours à la force pour maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales. En fait, le pouvoir de décision est aux mains des cinq membres permanents de ce Conseil: Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, URSS. Aujourd’hui, 190 Etats en sont membres.