Il s’agit d’un « procès » à grand spectacle. Le décor est conçu pour impressionner : les murs sont recouverts de tentures rouges agrémentées de croix gammée. Le public est limité : seuls quelques officiels et surtout des journalistes de la presse collaborationniste car l’objectif est d’impressionner l’opinion. Les avocats – le bâtonnier Guinaudeau et ses confrères ont été commis d’office, le traducteur officiel E. Duméril les assiste. Les entretiens se déroulent en allemand, le réquisitoire n’est pas traduit aux accusés. Il s’agit d’une parodie de procès.
Les inculpés sont des membres de l’Organisation spéciale, organisation dédiée à l’action directe, créée par le PCF dès octobre 1940. Ils doivent répondre de 49 chefs d’accusation : attentats contre l’occupant ou contre des collaborationnistes notoires, sabotages, vols de tickets d’alimentation, aide aux résistants, propagande communiste. Le contexte n’est guère favorable à la mansuétude des autorités allemandes. Contrairement à ce qu’elles espéraient à la suite de l’exécution de 48 otages le 22 octobre 1941 : faire peur pour dissuader le développement d’actes de ré-sistance, c’est en effet l’inverse qui s’est produit. De l’automne 1941 à l’année 1942 les actes de sabotage se sont multipliés. Par ailleurs le contexte international préoccupe le Reich confronté à la combativité de l’Armée rouge à Stalingrad où la Wehrmacht conduite par von Paulus devra capituler le 2 mars.
A l’évidence, les Allemands veulent faire un exemple. Ils considèrent les accusés comme des « assassins » ou des francs-tireurs, des « terroristes » criminalisant ainsi leur action. Trois inculpés sont condamnés à des peines de prison, trois sont acquittés faute de preuve mais deux d’entre eux seront déportés. Les deux femmes sont renvoyées à un complément d’enquête, mais également déportées. En dépit du délai de grâce fixé au 2 février, dès lendemain 29 janvier, 9 condamnés sont fusillés au terrain militaire du Bêle à Nantes. 25 autres le seront le 13 février 1943, parmi lesquels 5 Républicains espagnols. Les trois derniers seront exécutés le 7 mai 1943.
Au moment où se déroule ce « procès », de nouvelles arrestations surviennent. Des FTP – Francs tireurs et partisans – qui ont pris la relève en novembre 1942 des premiers résistants de l’OS, tombent à leur tour. Mais contrairement au procès très médiatisé de janvier, celui dit « des 16 » qui se déroule les 12 et 13 août passe quasiment inaperçu. Les autorités françaises vichystes n’ont même pas été informées, des « avocats » allemands sont désignés pour « défendre » les accusés, mais ils abondent dans le sens de l’accusation. 15 accusés sur 16 sont condamnés à mort dont deux seront graciés mais déportés (Denise Ginollin et Armand Loyen). Roger Astic est acquitté mais déporté. Le 25 août, 11 FTP sont fusillés au Bêle. Deux sont transférés en Allemagne et seront exécutés le 20 novembre 1943 à Tübingen.
Pour en savoir plus :
www.resistance-44.fr
*Dossier Les procès des 42 et des 16
*Liste des fusillés
Guy HAUDEBOURG, Nantes 1943. Fusillés pour l’exemple. Geste Editions.
Jean CHAUVIN, Lettres d’un héros ordinaire. Auguste Chauvin, résistant FTP (1910-1943), L’Oribus n°58
Marc GRANGIENS, Les procès des 42, film documentaire réalisé avec les étudiants du BTS audio-visuel du Lycée Léonard de Vinci, Montaigu-85.