En septembre 1944, alors que les forces françaises et alliés avaient débarqué en Normandie et en Provence, que l’Armée Rouge libérait les pays d’Europe centrale, que Paris était, comme Nantes et de nombreuses villes de l’ouest libérées, Saint Nazaire et sa région était encore pour de nombreux mois sous l’occupation de l’armée nazie.
La Résistance continuait son combat contre l’occupant. Jean de Neyman fut arrêté, jugé par un tribunal militaire allemand, condamné à mort et fusillé le 2 septembre 1944.
Jean de Neyman fut un des derniers fusillés pour actes de résistance. Cela fera donc 75 ans le 2 septembre prochain.
Jean de Neyman est une figure historique de la Résistance de la région nazairienne et de la presqu’Ile guérandaise, son engagement dès 1940 dans la Résistance a conduit son groupe à des actions de renseignements, de sabotage et de solidarité à l’égard des soldats allemands déserteurs.
Le samedi 31 Août à 16 heures, devant la stèle de Jean de Neyman à Heinlex, nous vous invitons au 75ème anniversaire de son exécution.
Cette initiative permettra de redonner le contexte historique local dans lequel Jean de Neyman a mené son combat pour un idéal de justice, de liberté, de paix, de progrès humain et de rappeler a portée toujours actuelle des valeurs de la Résistance.
La libération de Paris sans oublier Madrid
Lorsque Luis Royo-Ibanez entre dans Paris, le 24 août 1944, à bord de son half-track baptisé « Madrid », il laisse éclater sa joie devant l’Hôtel de Ville : « Aujourd’hui Paris, demain les Pyrénées ! » Ce républicain espagnol de la division Leclerc, membre de la compagnie surnommée la
« Nueve » (160 hommes dont 146 Espagnols pour la plupart anarchistes et communistes) avec à leur tête le colonel Raymond Dronne, a tout donné pour la libération de l’Afrique du Nord puis celle de la France.
Luis et ses camarades ont débarqué à Omaha Beach. Puis, sous la conduite de combattants de la Résistance, ils ont foncé sur Alençon avant d’entrer dans Paris – déjà largement contrôlé par les FFI du colonel Henri Rol-Tanguy – à bord des half-tracks portant les noms de batailles de la guerre d’Espagne, « Teruel », « Guadalajara », « Brunete » soigneusement rebaptisés pour les cérémonies du lendemain 25 août, « Montmirail », « Champaubert » ou « Romilly ».
Luis et ses copains ne fonceront pas sur Madrid pour combattre la dictature. On leur donnera l’ordre de poursuivre vers l’est. Surtout pas au sud, vers l’Espagne sous le joug du général fasciste Franco
passé sous protection des États-Unis. Dans son HLM de Cachan, Luis nous dira au crépuscule de sa vie : « La libération de Paris, de la France devait être une étape avant la libération de l’Espagne. Nous nous sommes battus puis nous avons été oubliés. »
Manuel Rodriguez était un parmi les 500 000 Espagnols qui ont cherché refuge en France, en 1939. Passé les Pyrénées, il a été enfermé dans un camp de concentration, à Argelès. Première image d’une partie de la France, celle qui passait son temps à enchaîner autour du maître berlinois plus de génuflexions que la liturgie collaboratrice n’en exigeait. Manuel s’échappera puis rejoindra les premiers groupes armés de la Résistance. Plus tard, il participera à la libération de Toulouse. La Ville rose et la France libérées, il s’engage dans les groupes armés qui tentent de reprendre la lutte en terre espagnole. Blessé, il rentre à Toulouse et finit sa vie délaissé et traité comme un pestiféré, presque comme un « terroriste ».
Maurice, ancien des Brigades internationales, a eu la mauvaise idée de perdre une jambe lors de la bataille de l’Ebre. Jeune et très beau garçon, fils d’une « bonne famille » de « gauche » bourgeoise et socialo-radicale, il avait compris avec plusieurs milliers d’ autres Français que la guerre imposée à
la République espagnole par les sbires d’Hitler et de Mussolini était un test grandeur nature avant le déferlement nazi sur l’Europe. Jusqu’en 1971, abandonné par sa famille, ignoré par les autorités, il a survécu en dessinant des caricatures sur la place du Tertre à Paris. Maurice et nombre de ses camarades survivants de la guerre d’Espagne nous ont quittés dans l’indifférence qui aurait été générale sans la solidarité jamais démentie du Parti communiste français.
Il aura fallu, en 1996, l’action combinée de Philippe Séguin et de Jacques Chirac, sous les hurlements de plusieurs députés de droite, pour que les brigadistes soient enfin reconnus comme « anciens combattants ».
Le colonel Henri Rol-Tanguy – qui nous disait : « Vous évoquez mon rôle pour la libération de Paris mais c’est l’Espagne qui reste mon premier combat antifasciste et qui a marqué la suite de mon engagement pour la liberté et la démocratie » – a, lui aussi, subi la discrimination en étant marginalisé dans sa carrière militaire. Compagnon de la Libération, grand officier de la Légion d’honneur, Rol fut heureusement reconnu des années plus tard comme un Français d’exception dans la lutte contre l’occupant nazi. Mais combien d’autres de ses camarades ont été maintenus dans l’oubli ?
Après des dizaines d’années de silence sur la guerre d’Espagne, la chape de plomb se fissure : films, livres, études, avec notamment le prix Rol- Tanguy délivré à des étudiants par l’association les Amis des combattants en Espagne républicaine (Acer) ainsi que documentaires et ouvrages, ont permis de donner à voir et comprendre la guerre d’Espagne, le courage des républicains espagnols et des brigadistes venus du monde entier. C’est aussi en se rappelant leur rôle qu’il convient, en 2019, de célébrer la libération de Paris.
Nous remercions notre ami José Fort ancien responsable de rubrique au journal l’Humanité pour sa contribution. José Fort est le fils du Commandant Fort un des rare officier français à s’être porté volontaire auprès de l’armée de la République d’Espagne pour combattre le coup d’état de la clique franquiste.
Pour en savoir plus un important dossier dans ce numéro
Le débarquement en Normandie le 6 juin 1944, l’avancée des troupes alliées à travers la Normandie et la Bretagne nourrissent la perspective de la victoire. Les Nantais attendent avec impatience leur arrivée dans leur ville. Le 4 août, Châteaubriant a été libérée. Militairement affaiblis par le débarquement et leurs défaites à l’Est, les Allemands sont inquiets et savent leur départ imminent. Ils font tout pour freiner l’avancée des troupes alliées. Le 9 août, ils font sauter leurs dépôts de munitions à Château-Bougon et activent les mines déposées le long des quais du port de Nantes. Les FFI * réussissent à empêcher la destruction de l’usine électrique de Chantenay. Ils envisagent de déminer les quais, mais l’opération est trop dangereuse et ils sont contraints d’ y renoncer.
Dans la nuit du 10 août – Angers a été libérée dans la journée -, les Allemands font exploser les piles du pont de la Jonelière. Le 11, ils amorcent les explosifs placés sur les piles des autres ponts nantais et minent tous les navires qui mouillent dans le port, y compris le refouleur des Ponts et Chaussées qui alimente la population en eau depuis la destruction de l’usine des Eaux. Les explosions se succèdent jusqu’au matin du 12 août: les infrastructures portuaires, les quais, notamment le quai de la Fosse, sont en grande partie détruits. Aux aurores les Allemands ont quitté la ville, franchissant la Loire et détruisant le pont de Pirmil après leur passage, opérant ainsi leur retrait vers la rive sud de la Loire.
Dans la nuit, les FFI avaient, sans perdre une minute, occupé le bâtiment du 11ème Corps d’Armée, place Foch dont la Kommandantur avait fait son siège, dès l’occupation de Nantes le 19 juin 1940. Au matin du 12, le commandant Grangeat**, chef des FFI, envoie le capitaine Jaunet avec un groupe d’une vingtaine d’hommes, à pied, prévenir les Américains que les Allemands ont quitté Nantes. Ils les trouvent sur la route de Rennes, à une dizaine de kilomètres. Les Américains exigent que les voies d’accès soient déminées, ce dont se charge le 5ème Bataillon FFI avec l’aide de démineurs de la Défense passive.
Le chef des Forces Françaises de l’Intérieur en Loire-Inférieure, Vendée et Maine-et-loire est le colonel François-Jacques Kresser-Desportes, alias Kinley. Il a pour adjoint le commandant René Terrière, alias Xavier-Dick. Le 15 juin, il nomme Gilbert Grangeat, alias Alain, 22 ans, commandant du 5ème Bataillon des FFI, basé à Nantes. Son QG est établi au Locquidy, à la Morrhonnière. Grangeat place ses hommes aux points stratégiques de la ville et contribue à y faire entrer les Alliés. Les Allemands ayant fui, l’arrivée des troupes alliées se déroule sans combat. La population les accueille avec soulagement, de la joie certes mais sans effusion: le souvenir des bombardements de 1943 est encore vif. D’autre part, il ne reste plus à Nantes qu’une partie de la population, à peine 50 000 habitants: ceux qui n’ont pas pu partir après les bombardements de septembre 1943 et ceux qui y viennent pour travailler. Et les Nantais restent sur le qui-vive: l’artillerie allemande reste active sur la rive sud, Rezé ne sera libérée que le 29 août.
Henry Orrion, désigné « maire » par le gouvernement de Vichy – Pétain l’avait décoré de la Francisque ! – est destitué. Il cède la place le 28 août 1944 à Clovis Constant, du groupe Libération-Nord, membre du Comité départemental de Libération (CDL), constitué à l’image du CNR, le Conseil National de la Résistance.
Après avoir repris Vannes, les troupes américaines se dirigent vers Nantes. Les FFI préparent leur entrée en déminant les routes d’accès. Le 12 août, vers 16 heures, la 4ème division blindée américaine fait son apparition, route de Rennes.
Nantes n’est pas un objectif immédiat pour les Américains. Les GI’s du général Patton viennent d’essuyer de lourdes pertes à Brest et Lorient. Ils considèrent que Nantes est une place difficile à prendre en raison de la proximité de Saint-Nazaire. Ils avaient d’ailleurs envisagé de bombarder la ville avant de passer à l’offensive. Max Eidem, l’émissaire des FFI dépêché le 4 août par G. Grangeat auprès de l’avant-garde alliée stationnée à Derval , obtient des Américains qu’ils renoncent aux bombardements.
Le dimanche matin, une affiche manuscrite (faute d’imprimerie) est placardée dans la ville, relayée par le journal collaborationniste Le Phare, autorisé à paraître… une dernière fois, annonçant que « Les FFI prennent en main l’administration de la cité. »
Le mardi 15, Michel Debré, alias François Jacquier, rejoint la Préfecture en compagnie de Lucie Aubrac, représentant l’Assemblée Consultative Provisoire d’ Alger. M. Debré s’autodésigne Commissaire de la République pour la région, annonce le rétablissement de la République et l’abrogation des lois de Vichy. Il nomme Alexandre Vincent, ancien bâtonnier du barreau de Nantes, comme Préfet de Loire-Inférieure, en remplacement du préfet Georges Gaudard, pétainiste notoire qui avait refusé de céder sa place le 12. Alexandre Vincent est réfugié avec sa famille à La Varenne, sur la rive sud, dans les lignes allemandes. Il franchit la Loire sur une barque, déguisé en pêcheur et est ramené à Nantes en Citroën traction-avant par le sous-lieutenant FFI Jacques Noblet.
Si Nantes est libérée, la guerre continue. Hitler ayant donné l’ordre à son état-major de tenir les forteresses de l’Atlantique, la « poche » de Saint-Nazaire, entre autres, enferme la population civile dans la guerre. Dans un rayon de 30 km autour de l’estuaire de la Loire, la région nazairienne est encerclée par les troupes américaines et les résistants. Les combats sont intenses, auxquels participent le 5ème Bataillon FFI puis la 25ème division d’infanterie. Il faut attendre le repli des troupes allemandes à Pornic et leur reddition du 8 mai 1945, signée à Cordemais, pour que la « poche » soit enfin libérée trois jours plus tard, le 11 mai.
Paris est toujours aux mains des Allemands. Le 19 août, le colonel Henri Rol-Tanguy, commandant des FFI d’Ile-de-France appelle à l’insurrection et à la mobilisation générale de la population. Paris s’est soi-même libérée le 25 août.
Si le rôle des Alliés ne saurait être minimisé, « l’apport de la Résistance à la Bataille de France ne devra pas être oublié. Il représente l’équivalent de 15 divisions selon les estimations des Américains, en particulier du général Eisenhower » affirmait Robert Chambeiron, secrétaire du CNR. En chassant l’occupant, la Résistance montre que la France entend reprendre en main son destin.
Après quatre longues années d’administration et d’occupation allemandes, quatre longues années de privations, d’humiliations, de répression, Nantes retrouve sa liberté. Elle n’oublie pas le drame des 48 Otages du 22 octobre 1941, ni les 50 exécutions de FTP en 1943, les nombreuses déportations, la rafle de Juifs en juillet 1942, les maquisards de Saffré, ni les 1732 civils tués par les bombardements, les 2500 blessés.
Un nouveau combat s’amorce: celui de la Reconstruction et de la mise en oeuvre des réformes élaborées dans la nuit de l’Occupation par le Conseil National de la Résistance en prévision des « Jours Heureux ».
* Les Forces Françaises de l’Intérieur ont été créées le 1er février 1944 par la réunion de L’Armée secrète, l’Organisation de résistance de l’armée et les Francs-Tireurs et Partisans Français (FTPF)
** Une plaque en hommage à Gilbert Grangeat a été apposée, le 12 août 2014, sur la façade de l’immeuble dans lequel il a vécu, 1 rue Kléber à Nantes
Pour aller plus loin
NANTES, ville libre de Terrière, Jean-Claude Ed. Geste
Nantes 1940-44 de Scheid, Michel Ed. Ouest-France
Histoire populaire de Nantes de Croix, Alain et alii. PUR
Nantes, le 24 Mai 2019
Objet :Présentation de la Bande Dessinée 50 Otages
Madame la Rédactrice,
Monsieur le Rédacteur,
Le Comité départemental du Souvenir des fusillés de Châteaubriant et Nantes et de la Résistance en Loire Inférieure, a l’honneur de vous inviter à la présentation de la Bande dessinée:
« Immortels »
Les 50 otages- Châteaubriant, Nantes,le Mont Valérien
Lors de la rencontre avec la presse qui se déroulera au lendemain de la Journée nationale de la Résistance
En souhaitant vous rencontrer, recevez Madame, Monsieur, nos meilleurs salutations,
Christian Retailleau
Président du Comité départemental du Souvenir des Fusillés de Châteaubriant et
Nantes et de la Résistance en Loire-Inférieure
Veuillez trouver, ci-joint, le communiqué de presse et le tract d’information du Comité Local d’Indre sur la Journée nationale de la Résistance du 27 mai 2019.
comite_indre_2019.pdf
Les autres cérémonies auxquelles participera le Comité Départemental auront lieu à :
– Nantes à 11h00, au Monument aux 50 Otages où le Comité déposera une gerbe,
– Trignac à 17h30, place de la Mairie où le Comité déposera une gerbe portant la mention « Hommage à la Résistance » et prononcera un discours.
Je vous invite à être présents à ces cérémonies, qui permettent de rappeler l’importance du CNR et de son programme dans la réalisation du modèle social et démocratique français à la Libération.
Très fraternellement,
Christian Retailleau
Président du Comité du Souvenir