On les aura !

Pour le regarder, cliquer sur le lien ci-dessous:

Il est aussi possible de l’atteindre sur le blog de Jean Perrochaud (vignette entre Equinoxe et Les Misérables) et de profiter ainsi de La Chanson de Craonne en bonus

Accueil

11 novembre 1940 : le drapeau tricolore flotte sur la cathédrale de Nantes !

Ce 11 novembre 1940, a une importance toute particulière. Non seulement le souvenir de la Première guerre mondiale est vif mais il s’agit du premier 11 novembre sous l’Occupation. Nantes vit à l’heure allemande depuis six mois. Les vaincus de 1918 décrètent, avec l’appro-bation des autorités « françaises » que ce 11 novembre ne sera pas férié et que tout ras-semblement sera interdit. C’est l’humiliation de trop !

Depuis l’été, différents signes montrent que tout le monde ne se résigne pas à l’Occupation, pas plus qu’à la Collaboration. Des papillons fustigent « le boche et le macaroni », le préfet signale des actes de sabotage de lignes téléphoniques militaires. Ces actes de refus s’inten-sifient à l’automne. Le 1er novembre, le commissaire principal signale au préfet la décou-verte de papillons « Vive de Gaulle » collés sur les devantures de magasins du centre ville. Le même jour des incidents – des sifflets du public – se sont produits au cinéma Olympia pen-dant les actualités allemandes. Le lendemain, il rend compte de « faits qui dénotent l’esprit actuel d’une partie de la population nantaise : « les tombes où reposent des soldats anglais ont reçu la visite, la veille (jour de Toussaint) d’un nombreux public et elles ont été particu-lièrement fleuries. » En outre, une banderole tricolore a été tendue sur toute la longueur du Monument aux morts 1914 – 1918, entrelacée dans une banderole noire. Il annonce qu’il fera surveiller les lycées le 11 novembre. Dans son rapport au Ministre-Secrétaire d’Etat à l’intérieur Peyrouton, le préfet Dupart signale que « la propagande communiste continue clandestinement à s’exercer par la distribution, sous le manteau, de nombreux tracts aux abords des usines. » Il promet de faire procéder à des perquisitions et à des internements.

Les lycéens et étudiants bravent l’interdiction

En effet, les lycéens et étudiants ont commémoré à leur façon la victoire de 1918. Les inspecteurs de police et les Feldgendarmes venus en renfort ont constaté des attroupements devant l’Ecole de commerce (20 à 25 élèves), 70 lycéens du Lycée Clemenceau se sont re-groupés dans le Jardin des plantes avant de déposer une gerbe devant le Monument aux morts dans la cour d’honneur du lycée puis de se rendre au Monument aux morts de la ville et d’y déposer une autre gerbe ; puis le cortège parcourant le centre ville, grossit au passage de lycéennes du Lycée Guisth’au, d’élèves de l’école professionnelle Launay. Au Palais de Justice une centaine d’étudiants ont déserté leur cours de droit. A 10 h 30, 150 étudiants et étudiantes ont tenté de déposer une gerbe, mais ils ont été refoulés par le service d’ordre. Les étudiants de l’IPO (une école d’ingénieur), munis d’une gerbe et suivis de 150 personnes se sont rendus au cimetière de la Bouteillerie. Après l’ordre de dispersion, ils se regroupent place Louis XVI, en face de la Kommandantur, avant d’être de nouveau dispersés par les polices allemande et française et de se reformer dans les rues du quartier, rue d’Argentré, rue Gambetta et rue Lorette de La Refoulais. En fin de matinée, deux étudiants de l’Ecole d’Hydrographie, « coiffés d’un bonnet de l’IPO et gantés de blanc » ont été arrêtés alors qu’ils saluaient le Monument aux morts. Des arrestations sont opérées.

L’appel des lycéens de Clemenceau

Etudiants, étudiantes
Il y a 22 ans, le 11 novembre 1918, la France était dans la joie de l’Armistice et de la Victoire. Chaque année, depuis cette date mémorable, le pays tout entier célébrait le 11 novembre. La France n’évoquait pas seulement, en ce jour, la victoire, mais elle honorait les héros qui avaient donné leur vie pour que ceux qui viendraient derrière eux puissent vivre dans la liberté et dans la paix. Etudiants, étudiantes, il faut, malgré l’interdiction donnée, célébrer cette année aussi le 11 novembre.
N’assistez pas au cours lundi prochain. Ce sera une manifestation qui produira son effet sur l’esprit boche. Il faut que nous résistions passivement ; un jour viendra où nous pourrons changer de méthodes et célébrer à nouveau le 11 novembre. Nous espérons que notre appel sera entendu et nous vous en remercions pour les vrais Français qui n’oublient pas ceux qui ont travaillé et qui ont fait leur devoir pour eux.

L’exploit de Michel Dabat et Christian de Mondragon

Autre souci pour le préfet Philibert Dupart : un drapeau tricolore flotte au sommet de la tour sud de la cathédrale. Le sacristain n’a pas réussi à l’enlever. Un soldat allemand a reçu l’ordre de grimper mais n’a réussi qu’à déchirer la partie rouge du drapeau qui est resté, fixé au paratonnerre. Pendant ce temps, la foule massée sur la place Saint-Pierre apprécie l’exploit. A 10 h 40, le curé de la cathédrale Saint-Pierre avise le préfet qui appelle les pompiers et la grande échelle. Peu avant midi, les couleurs nationales ont disparu.

drapeau_cathedrale.jpgLes auteurs de l’exploit ? Deux jeunes, Christian de Mondragon a tout juste 16 ans, lycéen et Michel Dabat, 19 ans, est élève de l’Ecole des Beaux-Arts. Celui-ci a son Brevet de prépara-tion militaire, il s’est investi pendant la débâcle dans l’aide aux réfugiés, particulièrement nombreux dans la région nantaise. A la veille de l’entrée des Allemands à Nantes, il avait tenté avec un ami de rejoindre l’Angleterre via l’Espagne mais ils avaient dû faire demi-tour à Bordeaux. Il reste déterminé à exprimer son refus de la défaite et concocte avec son ami Christian cette action spectaculaire soigneusement élaborée. Ils ont établi la liste de l’outillage nécessaire, pensé à porter des bleus de travail par-dessus leurs vêtements de ville pour ne pas les salir et éviter de se faire ainsi repérer à leur descente par une éventuelle patrouille. Car le couvre feu est en vigueur. Mais pour un coup d’essai ce fut un coup de maître.

Ces premières manifestations publiques ont encouragé un certain nombre des participants qui rejoindront les différents réseaux ou mouvements de résistance. Ainsi, après ces rassem-blements, plusieurs jeunes se rendent chez les Mahé, à la Morrhonnière, où ils rencontrent Marcel Hévin, dessinateur à la SNCF qui vient de créer un groupe de collecte de renseignements. S’ils prolongent la commémoration en allant déposer des coquelicots en papier sur les tombes de soldats britanniques au cimetière de la Gaudinière, au Pont du Cens, leur rencontre aura des prolongements et nous retrouverons les noms de Frédéric Creusé, lycéen à l’ENP Livet, Jean Grolleau, et Jean-Pierre Glou, étudiants à l’IPO aux côtés de celui de Michel Dabat dans la liste des 50 Otages fusillés le 22 octobre 1941.

1940, l’autre 11 novembre

Le 11 novembre est une date particulière et en 1940, non seulement le souvenir de la Première guerre mondiale est extrêmement vif, mais c’est la première commémoration depuis l’occupation allemande. Malgré l’interdiction des autorités militaires allemandes et de la préfecture de police, 3 000 lycéens et étudiants parisiens remontent les Champs Elysées et se rassemblent devant l’Arc de Triomphe pour commémorer, au nez et à la barbe des Allemands, la victoire de 1918 et défier l’armée d’occupation. Ils y déposent des fleurs, entonnent La Marseillaise. Certains arborent des rubans tricolores, quelques uns brandissent deux gaules. Cet événement symbolique est le premier acte public de résistance.

Faire quelque chose

Après seize semaines de combats, la France est défaite le 14 juin 1940. Les Allemands pénètrent dans Paris déclarée ville ouverte, le surlendemain les troupes paradent sur les Champs-Elysées. Le 17, le maréchal Pétain ordonne la cessation des combats, signe un armistice le 22 juin et le 28 juin, Hitler vient faire le tour du propriétaire. A la fin de l’été les réfugiés reviennent. Les vacances scolaires terminées, les cours reprennent. Mais tout le monde ne se résigne pas. La fronde gronde à l’Univer-sité où la présence de l’occupant suscite un rejet. Beaucoup pensent qu’il « faut faire quelque chose » et tâtonnent. De premiers gestes de résistance s’esquissent. Des « V » comme Victoire sont tracés à la craie sur les murs. Des incidents voire des bagarres éclatent entre jeunes et soldats allemands, notamment au café d’Harcourt. Les étudiants communistes font des lâchers de tracts dans les amphis. Le décret du 3 octobre excluant les Juifs de l’enseignement provoque un mouvement de sympathie envers les enseignants évincés. La rencontre, le 24 octobre à Montoire, de Hitler et Pétain et le discours du 30 octobre où ce dernier appelle à la « collaboration » jettent le trouble.

« Libérez Langevin ! »

11_nov.jpgCe même jour, le professeur Paul Langevin, physicien de renom international et fondateur en 1934 du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes est arrêté dans son laboratoire de l’Ecole de physique et chimie et interné. Le 8 novembre une manifestation a lieu devant le Collège de France à 16 h, « à l’heure où le Professeur Langevin aurait dû faire son cours », à l’initiative du Comité de Défense de Paul Langevin et d’étudiants communistes dont Claude Lalet, qui sera interné et fusillé à Châteaubriant.

Le 1er novembre, à l’occasion de la Toussaint, sans aucune consigne, 20 000 personnes étaient passées sous l’Arc de Triomphe où la police comptabilisa 500 bouquets. Dès les premiers jours de novembre, des papillons circulent dans les lycées parisiens à Janson de Sailly, Carnot (où Guy Môquet est élève), Buffon, Condorcet, Chaptal, Henri IV etc. L’un de ces tracts appelle à manifester le 11 novembre, à l’Etoile à 17 h 30. La radio de Londres invite la population française à commémorer l’armistice de 1918. Le 10 novembre, les journaux publient l’avis de la préfecture de police annulant les cérémonies commémoratives. L’avis est affiché dans les lycées et facultés. Ce qui amplifie la rumeur propagée par le bouche-à-oreille. L’interdiction provoque une réaction spontanée de petits groupes qui veulent défier l’occupant et décident de braver l’interdit. En fin d’après-midi, à la sortie des cours (car ce 11 novembre n’est pas férié), des lycéens surtout, des étudiants, des enseignants, se mêlent aux flâneurs sur les Champs-Elysées et se dirigent vers l’Etoile. De nombreux bouquets s’ajoutent aux gerbes déposées sur la tombe du Soldat inconnu. Les manifestants offrent un certain échantillonnage politique, du royaliste Alain Griotteray (qui fera une carrière politique au communiste Tony Bloncourt (qui sera fusillé en 1942). La foule ne cesse de grossir. Madeleine Riffaud parle d’ « une foule impressionnante ». Elle est estimée entre 3 000 et 5 000 personnes. Alors que la nuit tombe des cortèges défilent, se dispersent à l’arrivée de la police puis se reforment. Vers 18 heures des soldats de la Wehrmacht, armés de fusils, de mitrailleuses et de grenades débouchent sur les Champs-Elysées et la place de l’Etoile. Les uns manient la matraque, d’autres tirent sur la foule, faisant des blessés, des véhicules militaires roulent en zigzag sur les trottoirs. Les fourgons de police et les camions bâchés se remplissent de manifestants arrêtés. Le nombre exact des arrestations est difficile à établir : la préfecture de police énumère 105 noms, le gouvernement en annonce 123, le commandement militaire allemand évoque 143 arrestations et le recteur d’Académie avance le nombre de 150. Beaucoup seront retenus dans les locaux de la police, certains seront incarcérés dans les prisons du Cherche Midi et de la Santé.

manifestation_des_etudiants_le_11_novembre_1940.jpgLa manifestation est perçue comme le premier acte collectif de résistance. La jeunesse a ainsi affirmé sa volonté de combattre pour la liberté et, trois semaines après la poignée de mains de Pétain et Hitler à Montoire, de refuser la collaboration. C’est donc un désaveu de Vichy. En représailles l’Université de Paris est fermée, le recteur Gustave Roussy est limogé. Le Quartier latin est placé sous haute surveillance et des arrestations préventives sont opérées – plus d’un millier le 21 novembre. Les journaux parisiens accordent peu de place à la manifestation, Londres y voit un encouragement pour le général de Gaulle. Des étudiants y auront fait leur premier apprentissage et se rapprocheront des mouvements de résistance.

manif_11.11.1940.jpgDes manifestations ont eu lieu à Dijon, à Rouen et à Nantes. Des opérations collectives avec arrêts de travail sont menées dans le bassin minier du Nord. Chaque année durant l’Occupation, le 11 novembre donnera lieu à des gestes symboliques, dont l’un des plus célèbres reste le défilé des maquisards à Oyonnax dans l’Ain le 11 novembre 1943.

Aragon « Les enfants de France » in Le Crime contre l’esprit, Editions de Minuit (clandestines)
« Dans Paris bâillonné, le 11 novembre 1940, moins de cinq mois après qu’un maréchal de France eut proclamé que la Patrie avait touché la terre des épaules, les étudiants descendirent dans la rue, et leur jeune voix retentit si haut que la France tout entière l’entendit et cessa de croire à la défaite. (…) L’ennemi ne s’y trompa pas. On était au lendemain de Montoire, et cette manifestation des étudiants de Paris, il y vit bien le désaveu national de la politique de soumission instaurée (…) par les capitulards. »

Références :
Raymond Josse, La naissance de la Résistance étudiante à Paris et la manifestation du 11 novembre 1940. Revue d’Histoire de la Deuxième guerre mondiale, PUF, n°47, juillet 1962
Alain Monchablon, La manifestation étudiante à l’Etoile du 11 novembre 1940, revue Vingtième siècle, 2011- n° 110, Presses de Sciences Po
Henri Noguères et alii, Histoire de la Résistance en France, tome 1, Robert Laffont, 1967

Texte en hommage à Samuel Paty

Des milliers de personnes, 5 000 peut-être, rassemblées à Nantes, ce dimanche 18 octobre, devant le Monument aux 50 Otages et à la Résistance à l’initiative de la FSU, rejointe par d’autres organisations ont rendu un bouleversant hommage à Samuel Paty.
Le choix de ce lieu n‘est pas un hasard. Lieu de mémoire, il est aussi devenu au fil des ans, un symbole incarnant les désirs d’émancipation, la défense des valeurs de la République. Les résistants nous ont laissé la liberté en héritage.
Notre Comité du souvenir partage l’émotion, la colère et la détermination de celles et ceux qui ont affirmé : « Nous ne céderons pas à la peur. »
Samuel Paty a été tué, décapité dans l’exercice de son métier parce qu’il était professeur d’histoire et d’éducation civique, parce qu’il éclairait le monde pour ses élèves. Parce qu’il était un passeur de savoirs.
Comme tous les professeurs et les personnels de l’Education nationale, il faisait vivre les valeurs républicaines, la liberté d’expression, la laïcité, en leur donnant sens.
Parmi les Résistants honorés par ce Monument des 50 Otages, plusieurs étaient des enseignants : Titus Bartoli, Marc Bourhis, Pierre Guéguin, An Huynh Khuong, Raymond Laforge, ou imprimeurs clandestins : Raymond Tellier, Charles Delavacquerie. Les obscurantistes ont toujours craint la diffusion de la connaissance, le développement de l’esprit critique.
Cet assassinat abject nous commande de poursuivre le combat pour renforcer les fondements d’une République sociale, laïque et démocratique.

Vu à la télévision en 1971 – 22 octobre 1941, mort à Châteaubriant

https://www.ina.fr/video/CAF93022360/22-octobre-1941-mort-a-chateaubriant-video.html

22 octobre 1941. Sur les photos des victimes et l’avis de recherche de l’auteur de l’attentat contre le colonel HOTZ, le commentateur raconte comment cent otages ont été fusillés par les Allemands en représailles, pour sensibiliser l’opinion. Les 27 premiers ont été choisis dans un camps de prisonniers politiques de CHOISEL près de CHATEAUBRIANT. ITW d’un homme qui se souvient : Visite avec le journaliste : PE les vieux bâtiments du camp de prisonniers. « Jamais on aurait pensé qu’ils étaient capables de fusiller froidement ». Photo de de von Stupnagel :il veut un exemple. Photo de PIERRE PUCHEU, ministre de l’intérieur de Vichy, violemment anti-communiste,qui joue un rôle important dans la création des cours spéciales de justice, qui désignera lui-même les otages. ITW de FERNAND GRENIER, ancien prisonnier du camp de Choisel : ils avaient envisagé de se soulever contre la sentence. Grafittis des condamnés sur un mur. ITW d’un couple de fermiers, proches de la carrière où ont été fusillés les condamnés : après le départ du camion emportant les corps nous avons marché un mois dans le sang ». Défilé de la CGT, en mémoire des fusillés communistes à CHATEAUBRIANT dans la Loire Atlantique.Le monument. ITW de JACQUES DUCLOS : »les raisons pour lesquelles l’auteur de l’attentat ne s’est pas dénoncé…C’est le dénommé Pucheu qui a choisi des jeunes communistes, comme Guy Moquet dont le père était communiste ». Selon un article de l’Humanité du 09/11/1971, ce reportage sur le massacre de Châteaubriand en octobre 1941, a été tronqué : Fernand GRENIER explique dans le journal « On doit déplorer les importantes coupures apportées aux déclarations de Jacques DUCLOS et de moi-même…..Tout cela (le courage des militants communistes fusillés) avait été largement enregistré et a été supprimé. De même que divers autres témoignages ».

Les Cérémonies de Châteaubriant, Nantes, Indre et de la Blisière

NANTES: Vendredi 16 octobre – 17 h 45 :
Veillée du souvenir au Monument des 50 otages
Evocation artistique de Claudine Merceron et Martine Ritz
«CEUX QUI AVAIENT CHOISI»
avec la participationde Pascal Gillet, Michel Hermouet, Claudine Merceron, Martine Ritz
et les enfants: Tino, Lili, Maxence, Manolo et Eléonore.

MOISDON-LA-RIVIÈRE: Samedi 17 octobre – 14 h au cimetière
Dévoilement de la plaque en mémoire des trois fusillés inhumés en ce lieu le 23 octobre 1941
Hommage sur la tombe de Raymond Laforge

INDRE: Dimanche 18 octobre – 8 h 45 h : Rdv au môle devant la stèle Léoncie et Eugène Kérivel
Défilé, jusqu’au cimetière/ Allocution hommage à Eugène Kérivel
Recueillement sur les tombes des résistants indrais.

JUIGNÉ DES MOUTIERS: Dimanche 18 octobre – 10 h :
A la Blisière: Stèle à l’orée de la forêt
Hommage aux 9 fusillés du 15 décembre 1941
devant la stèle (direction étang de la Blisière)

CHÂTEAUBRIANT: Dimanche 18 octobre – 13 h30
Rassemblement rond-point Fernand Grenier
Défilé, jusqu’à la Sablière
Cérémonie en présence des autorités
Allocution de Fabien Roussel
Secrétaire national du Parti Communiste Français.
Évocation historique avec la participation de comédiens des Tréteaux
de France.

NANTES: Jeudi 22 octobre – 10 h : Cérémonie Monument aux 50 otages et à la Résistance
Dépôt de gerbes
– 10 h 45 : Monument du terrain du Bêle
Hommage aux fusillés – Appel aux morts avec les artistes Claudine Merceron et Martine Ritz
– 10 h 30 : Cimetière de la Chauvinière
Dépôt de gerbes sur les tombes – Carré des fusillés.

Les cérémonies sont organisées dans le respect des règles sanitaires en vigueur
Port du masque et du masque et distanciation physique

Pour se rendre à Châteaubriant un autobus gratuit partira de la place du Vieux Doulon à 11 h (arrêt bus TAN)
11 h 10 : Bd de Sarrebrück – arrêt Haubans (Malakoff) . 11 h 20 Place Pirmil station Tram/bus
11 h 30 : station tram/bus Chantiers Navals (quai de la Fosse) – 11h 35 Place Zola ( Côté Renardières )
11 h 40 Place des Châtaigniers , arrêt face au magasin Carrefour – 11h 55 arrêt bus église du Pont du Cens
12 h station Tram/bus le Cardo
Arrivée 13 h 30 Place Fernand Grenier à Châteaubriant pour le départ du défilé
Vous pouvez prévoir votre pique-nique arrêt prévu 10 mn sur aire de repos de Puceul (avant Nozay)
Retour à l’issue de la cérémonie par itinéraire inverse.
Hommage à Jean de Neyman

Dernière lettre de Jean de Neyman

jean_de_neyman.jpgPrès de La Baule le 02 septembre 1944
Mes chéris,
Nous voici donc en septembre, au début de la sixième année de ce cauchemar, qui semble heureusement ne plus devoir être bien long à se dissiper. Déjà, pour vous vont disparaître les angoisses de cette sorte de siège par la famine dont Paris souffre depuis si longtemps. Mais je sais que ce n’est rien devant l’immense soulagement moral de penser à la fin de l’infernale époque que nous vivons encore. Et les perspectives d’avenir, encore qu’incertaines, n’en sont pas moins lumineuses.
Moi-même, je suis heureux doublement, et pour mon compte personnel, et pour la joie de tant d’êtres qui en sont heureux. Pourtant, à cette atmosphère radieuse, il faut que j’apporte un nuage : il m’est arrivé ces derniers temps une rencontre fâcheuse qui va retarder peut-être longtemps le plaisir de nous voir.
Voici l’histoire en gros (vous aurez des détails ensuite).
Vers le 10 août, un jeune marin allemand, qui avait déserté, cherchait asile dans les parages de la ferme où j’avais élu domicile principal, depuis un mois à peu près. C’est moi qui le rencontrai d’abord, et, après une longue conversation, considérais que c’était un bon type qu’il serait inhumain de laisser reprendre et fusiller par les autorités militaires allemandes. Aussi je le vêtis en civil et demandais au fermier, Joseph Jergaud, de bien vouloir le nourrir à mes frais, pendant le temps (que nous supposions court) où les Américains ne seraient pas encore venus. Le gars se sentant en danger malgré tout, je lui donnais même un vieux revolver que j’avais trouvé dans la cave de ma maison en voulant enterrer mon poste radio. Tout se passa bien quelques jours, et j’eus même le plaisir de faire de bonnes parties d’échecs avec mon Fritz, ou plutôt Gerhardt, comme il se prénommait.
Par malheur, les américains ne venant pas, Gerhardt s’ennuyait et se montrait imprudent circulant autour de la ferme. Si bien qu’il fut pris par une patrouille avec son revolver en poche, et que je fus arrêté, ainsi que peu après tous les adultes de la ferme (Mme et M Jergaud, et un aide Jean Mercy que j’avais d’ailleurs comme à La Baule, alors que, mécanicien il prenait des leçons de sciences pour passer un concours naval). Nous fumes donc Gerhardt et moi d’abord en voiture à cheval, puis les autres en camion, conduit dans un camp entre Saint-Nazaire et Montoir, pour y être interrogés. Mme Jergaud fut relâchée, mais au bout de 8 jours, le 25 août.
Gerhardt, Jergaud et moi, nous passions devant un conseil de guerre, siégeant au camp de la marine Endras (entre Saint-Nazaire et La Baule). Comme je n’avais jamais voulu éviter mes responsabilités, et encore moins les rejeter sur le pauvre fermier, c’est évidemment moi qui fus condamné au maximum, et, tandis que Jergaud s’en tirait avec 2 ans de prison, je fut condamné comme Gerhardt. Il me restait encore une chance : le jugement devait être confirmé par le commandant de Saint-Nazaire, de sorte qu’au lieu d’être fusillé tout de suite, je fus conduit, à coté du tribunal, dans un pavillon ou j’ai attendu jusqu’à ce matin des nouvelles d’une sorte de pourvoi que j’avais formulé.
Voilà donc en résumé les événements, assez bêtes à certains points de vue, qui vont, je ne le crains que trop, vous faire tant de peine. Comme disait Heine :
Das ist das Los, das Menschenlos
Was schön sind gross, das nimmt’ein schlechtes Ende !
Maintenant, mes chéris, ne croyez pas que j’en suis bien affligé. Ah, pour ça, par exemple, il en faut davantage pour me faire perdre ma bonne humeur, et ces dernières semaines ont été bien agréables pour moi.
D’abord, il y a la joie d’avoir fait mon devoir ou, ce qui est la même chose, ce que je considérais comme mon devoir, envers et contre tous. Comme je l’ai expliqué aux juges, si le hasard met à côté de moi quelqu’un qui se noie, je ne me demande pas, en me jetant à l’eau, depuis combien de temps j’ai déjeuné.
Ensuite, il y a l’immense plaisir d’avoir pu, jusqu’au bout, faire du bien autour de moi. Passons sur Gerhardt. Ma connaissance de l’allemand m’a maintes fois permis d’être utile au 1er camp. J’ai également pu, et, c’est le principal, obtenir à peu près justice en ce qui concerne ceux qui n’avaient rien à voir dans l’affaire, Mercy et Jergaud. Sans parler du bien que j’ai pu faire en montrant une fois de plus aux Allemands que les Français ont le sens de l’honneur. Et mille détails qui me font penser aux vers de Kipling, traduits par moi-même pour compléter Maurois à la fin de son célèbre poème « Si… » :
Si tu peux, lorsque vient l’instant désespéré
De tout ce qu’il contient, tirer pourtant la somme,
Alors à toi, mon fils, est la Terre entière, et,
Bien plus, tu es un Homme !
Et puis, il faut que je l’avoue aussi, je suis heureux et fier du succès d’estime que j’ai remporté pendant mon jugement. Quand le président m’a demandé pourquoi j’avais recueilli Gerhard, et si je ne savais pas que c’était interdit, et que j’ai répondu : « pour un Français c’est une question d’honneur d’aider celui qui demande de l’aide, et l’honneur est d’autant plus grand que l’on risque d’avantage » – quand, après le réquisitoire qui demandait la mort pour Jergaud et moi, et après la plaidoirie qui nous confondait aussi, on m’a demandé si j’avais quelque chose à ajouter et j’ai dit : « Je précise bien que, désirant dès le début conserver l’entière responsabilité de mon acte, je n’ai jamais dit à la ferme (où l’on ignore l’allemand) ce qu’était au juste Gerhart, de sorte que je suis seul responsable. » , – à ces moments il y a eu des murmures dans la salle et ce n’était pas de la moquerie. Et là où, je dois le dire, j’ai éprouvé l’une des plus puissantes impressions de bonheur de ma vie, ce fut, tout de suite après le jugement, quand j’ai entendu discuter sur moi les hommes de garde devant le couloir de ma cellule, Si vous aviez pu les entendre, mes chéris mon cœur eut éclaté de fierté joyeuse.
En plus de cela, il y a eu une foule de petits à cotés agréables, une foule étonnamment nombreuse de réjouissances secondaires, qui me donnent l’occasion de vous donner une vue de quelques détails.
Le seul ennui que j’ai eu, c’est que, le jour où l’on m’a arrêté, on m’a pris mes si utiles lunettes et, que depuis, personnes n’a jamais pu savoir ce qu’elles sont devenues. Personnellement je n’ai jamais pu comprendre pourquoi ; quelqu’un de vous comprendra peut-être, à la longue, quoique, maintenant que nous ne nous verrons plus, cela n’ait vraiment plus beaucoup d’importance… !
Un premier incident que nous avons eu en route mérite d’être signalé, il constitue vraiment un petit fait comique. Comme nous voyagions sur notre carriole, où nous étions attachés fort discrètement, tirés par mon excellent cheval vers une destination hélas triste, un passant rentrait du travail à pied nous demanda naïvement : « Il n’y a pas une place pour moi ? »
Je n’avais pas ri avant mais, à partir de ce moment, je perdis toute mauvaise humeur ou dépit de mon arrestation. Et depuis, j’ai toujours eu des occasions agréables ou divertissantes. C’est ainsi que j’ai pu couper dans ma planche, obligeamment prêtée, d’une part un échiquier percé de trous où s’infiltraient les tiges des pièces, découpées d’autres part. De cette façon j’ai pu jouer en paix sans que les voisins puissent brouiller le jeu, quelle que fut leur turbulence juvénile. Fallait voir ce jeu fait de fil de fer et de bois, signé Jean, reconnaissable à 100 mètres !
Il fallait aussi voir les Allemands s’empresser à jouer avec moi (qui ne pouvais causer aux autres prisonniers) comme s’ils désiraient tous me consoler, et prouver par leur amabilité qu’ils déploraient ma situation et qu’ils auraient bien voulu faire quelque chose – mais quoi ? – pour ne pas me voir fusiller (on s’y attendait dès le début).
Aussi n’est-ce pas sans laisser presque des amis que j’ai quitté le camp : à peu près tous ceux avec qui j’avais parlé un peu s’en faut. Naturellement j’ai du y laisser aussi, aussi avec quelque regret, le plus beau de mon équipement ; c’est-à-dire mon jeu d’échecs-, quand je serais ministre, je changerai le texte du règlement rigoureux dont je fut victime… !
Or, depuis le jugement, les doubles rations (pour le moins) de tout ce qui est comestible ou favorable, dont je suis favorisé ; auraient enthousiasmé ceux qui s’imaginent que « Jean bon » ne peut vivre sous autre orthographe (si j’ose ce déplorable calembour). Au début je crus à un cuisinier fantaisiste qui aurait voulu terminer peut être une époque de son service par un festin capable de faire sensation, et je m’attendais à retourner à mon ordinaire modeste, en homme de bon sens que je suis. Mais comme mon ahurissante abondance continuait à régner de plus en plus belle, ce qui de l’extérieur ou de l’intérieur toutes sortes de friandises ne cessaient d’affluer, la seule explication valable, à laquelle je dû me rendre, était une bienveillance collective touchante chacun, se demandant si cela finira bien mal pour moi, concluait que le mieux devait être de participer par tous les moyens à me rendre « succulentes » les heures dont j’étais encore maître, en attendant qu’on sut si mon pourvoi, soutenu par mon avocat, arriverait à être rejeté ou non. Et, de la part des officiers aussi, une amabilité trop franche et personnelle pour N’être que de la propagande, venait satisfaire tous mes désirs. Ainsi, en l’absence de mes lunettes on a réussi à me faire voir clair en mobilisant les lunettes d’essais de l’oculiste militaire ! Et une chambre étant plus lumineuse, on a même été jusqu’à m’autoriser à sortir dans le plus éclairé de tous les couloirs d’ici, avec tout mon matériel. Car le plus beau, c’est qu’on m’a pourvu d’un matériel comme je n’en eu pas souvent : table, sous-main, papier à volonté, crayon chimique, gomme, règle, couteau. (Et tout pour Jean ! comme disait ma petite sœur autrefois)- et par-dessus le marché, l’autorisation de travailler à tout ce que je voulais laisser après moi qui me paraît pouvoir être utile aux générations futures, pour parler modestement !
C’est ainsi qu’en plus de cette lettre vous récupérerez de moi presque un volume de remarques et réflexions plus ou moins scientifiques et pédagogiques. J’espère qu’elles intéresseront Papa et peut-être un professeur curieux de points de vue non classiques.
Je m’en vais donc disparaître dans les meilleures conditions possibles, après avoir passé mes dernières semaines de condamné plus confortablement que bien d’autres semaines, sans avoir subi aucun mauvais traitement – après avoir eu la chance de voir le sinistre tableau du monde de 1939 remplacé par les claires perspectives de 1944, et la nouvelle chance que ma condamnation me donne le droit de penser que je n’y suis pas complètement étranger – après avoir dégusté l’amusante et flatteuse ironie du sort qui me fait l’un des derniers fusillés français de cette guerre – avec l’agréable sensation d’avoir laissé par écrit le meilleur de moi-même, en plus de ce que j’ai pu laisser comme influence durable dans la vie de ceux que j’ai connus.
Et comme dans les conditions où elle se produit, ma disparition peut avoir autant d’effet que le bien que j’aurais pu faire en un peu de vie supplémentaire, mon seul regret est le chagrin qu’elle ne peut hélas manquer de vous causer.
Ainsi, si vous voulez me faire rétrospectivement plaisir, ne soyez pas trop malheureux. Je vous ai assez aimés pendant ces dernières 20 années pour que vous ne m’en vouliez pas de vous laisser seuls ensuite. Ne soyez pas égoïstes. Vivez pour continuer à faire progresser le monde, comme vous-mêmes me l’avez appris à le faire.
J’ai conscience encore plus aujourd’hui, combien tout ce que j’ai fait est au fond votre œuvre et je vous prie de faire quelqu’un de bien de chacun de vos petits-enfants actuels et futurs – car je compte sur vous pour que les enfants de Nénette soient aussi dépourvus de toute illusion religieuse que moi, et que ce soit en pleine conscience qu’ils sachent faire leur devoir d’homme.
A propos d’enfants, si vous le pouvez, intéressez vous au second fils de Jergaud, un bébé de 5 ans, mais qui a du bon ; vous me ferez plaisir en le faisant ; c’est une dette de reconnaissance. Vous pourriez avoir chez lui divers objets m’appartenant. Voici son adresse : Ker Michel en Saint- Molf par Guérande (Loire Inférieure).
Pour finir par une plaisanterie, Papa y trouvera la solution du problème des 2 ampèremètres dont l’un marque 6 ampères pendant que le premier n’en marque que 3…
En vous embrassant, mes chéris, je vous écris la conclusion de ma vie, entre les 2 morales célèbres : – il n’est pas besoin d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer – et : toute la sagesse humaine tient dans 2 mots : attendre et espérer, il y a de la place pour ma synthèse : – tout le bonheur de l’homme tient dans ce devoir « Agir et espérer ».
Jean.
P.S. Naturellement saluez tous ceux qui me sont chers.
20200905_160900-1.jpgCérémonie commémorative en hommage à Jean de NEYMAN
Heinlex, Saint-Nazaire 5 septembre 2020
Allocution de Guy TEXIER

Mesdames les représentantes de Monsieur le Maire,
Mesdames et Messieurs les élus,
Chers amis et camarades,

En cette année 2020, nous commémorons le 76ème anniversaire de l’exécution de notre camarade Jean de NEYMAN, par l’armée d’occupation nazie.
Mais c’est aussi le 75ème anniversaire de la libération des camps de concentration et d’extermination en Europe et en Asie.
C’est aussi la victoire des peuples contre la barbarie de l’idéologie criminelle qu’ont été le fascisme et le nazisme.
C’est aussi le 80ème anniversaire de l’invasion de notre pays par l’armée nazie et l’instauration de la collaboration voulue et décidée par PETAIN, ce maréchal félon et son gouvernement de Vichy.
Ce n’est évidemment pas par une brève allocution que l’on peut rappeler l’ensemble des évènements de cette époque qui ont conduit à cette guerre qui fit près de 50 millions de morts.
20200905_162304-1.jpgMais il faut se rappeler que de capitulation en capitulation devant les exigences hégémoniques qu’HITLER avaient annoncées dans ‘’ Mein Kampf’’ , les accords de Munich lui livrant la Tchécoslovaquie, jusqu’à la drôle de guerre qui permit à son armée de franchir en un temps record la distance entre le Rhin à La Loire et de hisser sa sinistre croix gammée sur la plupart des édifices de notre capitale, le pouvoir politique français avait sombré dans le déshonneur et l’indignité pour finir dans la plus dégradante collaboration avec l’ennemi.
Il faut se souvenir que les députés communistes étaient embastillés en Algérie et seuls 80 courageux députés avaient suivi le chemin de l’honneur en s’opposant aux pleins pouvoirs de PETAIN.
Parmi ces 80 députés, pas un seul de la Loire-Inférieure.
Après l’interdiction du parti communiste en septembre 1939, sous prétexte du pacte germano- soviétique, les partis politiques et syndicats sont interdits un an plus tard en octobre 1940 et qui conduit à l’arrestation et la clandestinité pour échapper à l’internement de milliers de militants ouvriers.
Ce sont ces hommes comme Jean, et ces femmes qui, dans une France trahie laissant un peuple abandonné, désemparé, en proie à la pire des confusions, levèrent le drapeau de l’honneur, de la dignité nationale, de la liberté, dénoncèrent la trahison, constituèrent les ‘’comités populaires’’, premiers embryons de la Résistance intérieure, s’engagèrent dans la lutte armée, d’abord par petits groupes, puis constituèrent les maquis.
C’est une armée du peuple composée de communistes, de socialistes, de démocrates, de syndicalistes, croyants ou non croyants, fidèles aux idéaux de la République qui formèrent les premiers groupes de Résistance par des actes individuels de sabotage, de diffusion de tracts appelant à refuser la collaboration, avec l’aide de travailleurs étrangers dont particulièrement de Républicains Espagnols.
Pour beaucoup d’entre eux, la Résistance avait commencé bien avant avec la guerre d’Espagne, mais aussi contre la montée de l’extrême droite et du fascisme en France et en Europe.
Dès 1940, des hommes et des femmes, dans toute la France ne supportant pas que notre pays soit placé avec l’armistice de PETAIN, avec la collaboration, sous la tutelle nazie, soit pillé de ses richesses, ont organisé la lutte contre l’occupant et ses collabos de Vichy, de LAVAL, PUCHEU, DARNAND et autres individus de la droite et extrême droite.
C’est dans ces conditions que les premiers actes de Résistance se sont produits en France contre l’occupant, qui avec la collaboration de la droite réactionnaire et revancharde de 1936, de l’extrême droite issue de l’idéologie boulangiste et maurassienne, fondèrent en Loire Inférieure le groupe ‘’collaboration’’, dont Alphonse de CHÂTEAUBRIANT fut le créateur avec d’autres officiels très complaisants.
Il est peu fait état de la Résistance dans la région nazairienne et de la Presqu’ile, pourtant elle a été active dès 1940.
L’évasion du Jean BART le 17 juin 1940, a été sans doute le premier acte de Résistance collectif, quand 350 ouvriers et encadrants des chantiers navals ont volontairement participé, avec autant de militaires, à son évasion vers Casablanca pour qu’il ne tombe pas aux mains de l’armée allemande.

Comment ne pas évoquer les inscriptions anti-allemandes, les tracts appelant à résister, les sabotages, le refus de la servitude, l’aide aux militaires anglais après le drame du Lancastria et du commando du 28 mars 1942, dont plus de 200 amis et camarades en ont été les artisans de 1940 à 1945.
Le sabotage de l’hydravion ‘’Arado’’ à la SNCASO, dont les auteurs ont été dénoncés, internés, déportés avec Adrien BERSELLI, René ANDRE, Jean BOURMAUD, Jules BUSSON.
Le dynamitage de la permanence de la LVF avec Albert ROCHETEAU, Jean DREAN, Georges GIRARD ( le futur commandant CONAN), avec l’aide des ‘’dynamiteros’’ Républicains Espagnols, internés au ‘’camp Franco’’ de Montoir-de-Bretagne, et qui ont multiplié les sabotages dans la construction de la base des sous marins, sous la responsabilité de notre camarade Juan ESCUER GOMIS, et qui furent déportés pour beaucoup d’entre eux ou fusillés à Nantes en 1943.
Comment ne pas évoquer les noms de Marthe GALLET, de Suzanne MAHE pour le transport des armes et explosifs, des tracts, qui furent arrêtées, torturées, internées ou déportées ?
Comment ne pas évoquer Maurice et Louisette PICONNIER, BERTHO, PERRICO, BECARD et tant d’autres comme André LE MOAL fusillé à 17 ans ou encore Hubert CALDECOTT, Jean DREAN, Guy LELAN ou LABROUSSE, eux aussi fusillés au Mont Valérien ou à Nantes, mais aussi BIREMBAUT, SCULO COQUET et tant d’autres internés, déportés ou fusillés ?
Comment ne pas évoquer aussi l’action du groupe Henri MAHE et Georges TANCHOUX de La Baule, du réseau Jade en lien avec le renseignement, dont plusieurs d’entre eux ne revinrent pas des camps de concentration, ou encore le groupe gaulliste LITOUX de Saint-Lyphard ?
C’est aussi le réseau ‘’Georges France 31’’ animé par Albert VINCON, Henri FOGEL, Germaine LARDON, avec Henri ALLANET, Jean GUITTON, composé de nombreux Francs Maçons, plus spécialisés dans le renseignement et l’évasion d’aviateurs.
Le groupe animé par notre camarade Jean de NEYMAN, très actif dans la propagande anti nazie et le sabotage, la solidarité avec les soldats allemands déserteurs, se doit d’être souligné comme combat contre une idéologie criminelle et un combat contre l’occupant.
Il est choquant de constater qu’il est célébré, y compris à Saint-Nazaire, les victimes militaires des guerres coloniales, comme les sales guerres d’Indochine et d’Algérie, mais que sont ignorés les victimes et les acteurs de cette Résistance populaire composée d’hommes et de femmes qui n’ont pas chercher la gloire, ni les médailles.
Comme il est choquant que des noms de rues, notamment à Nantes, portent le nom de collabos notoires ou de résistants de la 25ème heure.

Parce que la Résistance des uns ne saurait dissimuler la veulerie des autres, et parce que les actes héroïques de ceux et celles qui avaient choisi de combattre l’oppresseur, ne doivent pas faire oublier les crimes de ceux qui dénonçaient, vendaient, assassinaient, humiliaient, dont les héritiers d’aujourd’hui sont la droite extrême et l’extrême droite, qui par leur présence à des commémorations d’hommages aux déportés ou qui souillent de leurs inscriptions négationnistes les lieux de résistances ou de martyrs, comme récemment à Oradour-sur-Glane, relèvent la tête, encouragés par les déclarations haineuses, racistes et xénophobes répandues et impunies.
Malgré tout ce que l’on dira, on ne saura jamais l’ampleur du travail de toute la Résistance, de tous ceux et toutes celles, qui dès 1940, se sont levés pour s’opposer que la France, ce pays des Lumières, devienne un pays qui aurait perdu son honneur dans la servitude à l’idéologie nazie et celle de la collaboration.
Toutes et tous ont été des héros, ils étaient communistes, socialistes, gaullistes, républicains, syndicalistes, croyants ou non croyants, français ou étrangers, ils ont été l’honneur de notre pays et de son peuple.
Jean, est bien la figure de cet héroïsme sublime dans la solitude la plus cruelle, qui n’a eu que le soutien de sa propre conscience, celui de son devoir envers soi même et la protection de ses camarades.
C’est la grandeur de cet homme à qui en rendant hommage aujourd’hui, c’est à toutes celles et à tous ceux de la Résistance que nous rendons hommage, pour que nous ne les oublions pas.
Mais honorer la Résistance et de tels martyrs, ce n’est pas seulement saluer des tombes et des stèles, c’est garder l’enseignement des morts, car les morts sont vivants, quand ils demeurent dans notre souvenir, lorsque nous n’oublions pas les grands exemples qu’ils nous ont donnés.
Aujourd’hui rien ne serait pire que de célébrer le passé, la mémoire pour oublier le message, de s’autoproclamer héritiers dans la ferveur émotionnelle d’une commémoration en laissant le monde aller là ou il va.
Pour demeurer humain, nous devons encore et toujours savoir dire non, quel qu’en soit le risque.
Pour terminer je veux citer cette phrase du Résistant et historien Jean CASSOU : ‘’c’est au nom de ceux des nôtres, qui ont risqué la mort pour la liberté que nous vous demandons à vous, à ceux des jeunes générations, d’être vigilants. Nous vous passons le flambeau, à votre tour de vous battre quand il le faudra, comme il le faudra, pour la justice, la dignité humaine, la liberté’’
Je vous remercie de votre attention.

Portrait d’une résistante nazairienne: Suzanne Mahé

Suzanne Justamont était fille d’un père petit industriel d’une famille protestante et d’une mère catholique. Des dépôts de bilans successifs entraînèrent une relative prolétarisation de la famille. Son père était indiqué « barman » sur le registre de naissance et en 1940, lors du mariage de sa fille « commerçant ». Sur les conseils d’un enseignant, elle passa le concours d’entrée à l’École normale d’institutrices où elle découvrit les textes de Marx. 

Lors de sa première année d’enseignement en 1933-1934, à une quarantaine de kilomètres de Niort, elle adhéra au Syndicat des instituteurs et se lia avec deux enseignantes avec qui elle effectua, pendant l’été, un voyage de six semaines à bicyclette, en Allemagne, y découvrant l’implantation du nazisme. Revenue en France, nommée à Saint-Martin-de-Mâcon près de Thouars, elle adhéra au Secours Rouge International. Responsable de l’Union des jeunes filles de France à Thouars (Deux-Sèvres), elle adhéra au Parti communiste en 1934 et milita aussi au comité mondial des femmes contre la guerre. En avril 1936, lors d’un meeting du comité thouarsais du Front populaire des jeunes, elle représenta la section de Thouars du comité mondial des jeunes filles. Après juin 1936, elle vérifia régulièrement si les employées des magasins disposaient bien d’un siège qu’elles venaient d’obtenir. Elle consacrait aussi ses moments de liberté à collecter pour l’Espagne républicaine.
Elle participa à la création, dans le SNI des Deux-Sèvres, d’un groupe des jeunes de l’enseignement, dont elle fut secrétaire à partir de 1935, qui, chaque été, voyageait dans différentes régions de France, s’efforçant de nouer le contact avec les populations ouvrières et paysannes. Par ailleurs, aux vacances de Pâques, elle participait à Paris aux écoles du Parti communiste. Enfin, à Noël, les groupes des jeunes de l’enseignement organisaient des rencontres internationales ; en 1939, elle y rencontra Pierre Mahé, son futur mari. Comme lui, elle avait fait grève le 30 novembre 1938, malgré la réquisition des fonctionnaires, par discipline d’organisation et pour montrer l’exemple. Pierre Mahé étant mobilisé, ils décidèrent de se marier pour qu’il bénéficie d’une permission, le 23 mars 1940 à Saint-Nazaire. Il fut fait prisonnier et envoyé en captivité près de Stettin à Rawa Ruska (Allemagne) ; après cinq tentatives infructueuses, il s’évada et gagna la Suède, mais ne réussit à revenir en France qu’en juin 1945.
En février 1940, lors d’une perquisition à son domicile, la police trouva des livres communistes. Elle fut arrêtée peu après son mariage et incarcérée en avril à la prison de Tours (Indre-et-Loire) dont elle fut libérée le 18 juillet 1940. Elle reprit son poste d’institutrice à la Madeleine de Guérande, près de Saint-Nazaire, où existait une cellule communiste clandestine. Elle était chargée d’aller dans les familles pour repérer qui, éventuellement, pourrait aider, cacher un militant. Figurant sur la liste des enseignants(e)s communistes, elle fut révoquée en décembre 1940 et en avril-mai 1941, recherchée par la police française, elle gagna le Morbihan, puis Paris où elle trouva le contact avec le Parti communiste. Elle habita Argenteuil puis Colombes, et dans cette ville, fut responsable du comité des femmes du réseau du Parti communiste clandestin. Elle prit le nom d’Annick pour son travail de liaison. Elle fut arrêtée le 19 novembre 1941 et interrogée par le commissaire David, de la Brigade spéciale 2, quatre jours plus tard. Condamnée à deux ans de prison, elle fut enfermée à la Petite Roquette, où les détenues les plus politisées organisèrent des cours, un journal et réussirent à faire sortir des renseignements par leur avocate. Le jour anniversaire de la victoire de Valmy, suivant le mot d’ordre du PC de manifester, elle participa à une prise de parole dans la cour de la prison. A la suite d’un procès en janvier 1943, condamnée à une peine de prison, envoyée au fort de Romainville, elle fut déportée le 13 mai 1944 et arriva au camp de Ravensbrück (Allemagne) le 16 mai 1944 par le dernier convoi de 750 femmes. Elle fut, de là, envoyée à Hanovre (Allemagne) dans une usine de produits chimiques où, là aussi, les déportées politiques essayèrent de constituer un collectif capable d’actes de résistance dans leur vie quotidienne. Elles furent délivrées par l’armée américaine en mars-avril 1945.
Rapatriée en France, très amaigrie, elle retrouva son mari en juin 1945. Ils furent d’abord réintégrés dans l’enseignement à Pornichet (Loire-Atlantique), où elle commença une intense vie militante de quartier, autour des questions du ravitaillement, et dans le cadre du PCF. De retour en septembre 1947 à Saint-Nazaire où la vie reprenait lentement, ils s’installèrent dans le quartier de Kerlédé, habitant l’un des 210 bungalows provisoires. Elle participa aux nombreuses activités de l’Amicale de quartier, très vite sous influence communiste : lutte pour l’amélioration des conditions de vie quotidienne, accueil d’enfants du Secours populaire, d’enfants des mineurs en grève en 1948, sou du soldat, lutte contre la guerre du Vietnam, puis d’Algérie. En 1954, Suzanne et Pierre Mahé s’installèrent dans le quartier de Plaisance ; elle continua le même type d’activités militantes et prit plusieurs fois la parole contre la guerre d’Algérie, à Saint-Nazaire, et à Rennes, lors de la fête de l’Union des femmes françaises. 



En 1950, elle remplaça, après sa destitution du conseil municipal, Madeleine Gallen*, en tant que conseillère municipale communiste, administratrice du Bureau de bienfaisance ; elle assura ce mandat jusqu’en avril 1953. Elle intervint à plusieurs reprises pour défendre les positions de la minorité communiste (distribution de lait aux enfants des chômeurs, carte sociale municipale pour les économiquement faibles, questions scolaires). 

De 1962 à 1968, la famille Mahé, avec ses deux enfants, vécut à Nantes afin que Suzanne, victime d’une dépression, puisse y être soignée. Ils revinrent à Saint-Nazaire en 1968. Elle mourut dix années après la disparition de son mari.

POUR CITER CET ARTICLE :
https://maitron.fr/spip.php?article119469, notice MAHÉ Suzanne, Lucienne, Alphonsine [née JUSTAMONT Suzanne] par Julian Mischi, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 13 novembre 2019.

SOURCES : Arch. Dép. Deux-Sèvres, 4M 13/4E. — Arch. mun. Saint-Nazaire (Cristel Gravelle). — Entretiens avec S. Mahé et témoignage écrit. — Émission de « Turbulences », radio libre locale, 17 février 1984. — Raconte camarade, par Maxime (pseudonyme de Pierre Mahé), Saint-Nazaire, 1974, 354 p. —MAHE (Pierre), Raconte Pierre, Saint-Nazaire, AREMORS, 1994, 135 p. — Presse locale (quartier de Kerlédé). — Dominique Loizeau, Femmes et militantismes, Paris, L’Harmattan, Logiques sociales, 1996. — Camélia Zegache, Les femmes dans la Résistance en banlieue Nord, 2000, Mémoire de maîtrise, 178 p. (Université de Paris 13). — Julian Mischi, Traditions politiques locales et communismes ouvriers. L’implantation du PCF dans la région de Saint-Nazaire, Saint-Nazaire, AREMORS, 1998, 201 p. — Notes de Jacques Girault, d’Alain Prigent et de Guy Texier. — RGASPI, pas de dossier au Komintern.