Torture au commissariat central de Nantes

Lettre passée clandestinement à sa femme par Henri Lefièvre (8 octobre 1942)

Quoique ça a été très dur. J’ai été deux heures et demi sous les coups ; je t’assure que je n’étais pas beau à voir pendant huit jours. Trois jours sans pouvoir manger que du raisin ; enfin ça se tasse. Encore mal aux côtes.

Lettre passée clandestinement à sa femme par Claude Millot (12 février 1943)

Au début, nous avons eu à endurer les coups et la torture. Ce fut odieux. Pour moi, un mois de cette existence, menottes aux mains.

Mise en garde
Exemple de collaboration des autorités françaises

Un exemple de collaboration franco-allemande dans la recherche des francs-tireurs :

Les méthodes allemandes sont clairement justifiées par la criminalisation des résistants.

Mise en garde
Mise en garde

Gaêtan Rondeau Maire de Nantes.

Phillipes Dupard est Préfet de Loire Inférieure.

Arrestation de Marin Poirier
La difficile naissance de la Résistance en Loire-Inférieure

LA DIFFICILE NAISSANCE DE LA RÉSISTANCE EN LOIRE-INFÉRIEURE (1940-1942)

Depuis l’été 1940, le département a vu naître de nombreuses formes de résistance spontanée à l’occupation.

Parallèlement, diverses organisations se sont mises en place, tel le comité d’entente des anciens combattants de 14-18 (Léon Jost, Alexandre Fourny) qui fait évader de nombreux soldats français prisonniers des Allemands vers la zone non occupée.

C’est aussi à ce moment que les premiers réseaux se créent (Bocq-Adam, Marcel Hatet, Marcel Hévin) et entrent en relation avec les envoyés de Londres (D’Estienne d’Orves ou le colonel Rémy). Des militants syndicaux entrent en contact avec la direction nationale de Libération-nord.

Mais la plupart de ces premiers résistants sont rapidement arrêtés.

Arrestation de Marin Poirier
Arrestation de Marin Poirier

Marin Poirier, cheminot socialiste, est le premier Nantais fusillé pour avoir participé à l’évasion de nombreux prisonniers de guerre français et les avoir aidés à passer en zone non-occupée – dans le cadre du groupe des Anciens combattants dirigés par Léon Jost. Il est aussi accusé d’avoir commis des attentats contre l’armée allemande (avec le groupe Bocq-Adam).

Depuis Septembre 1939, le Parti communiste français est interdit. Jusqu’au printemps 1941, la principale activité résistante des communistes qui se réorganisent clandestinement est la confection de tracts et de papillons principalement dirigés contre le régime de Pétain, ce qui amène l’internement au camp de Châteaubriant de nombre d’entre eux.

Camp de Choisel 1941
Camp de Choisel 1941

Autour de Marcel Paul, un petit groupe de militants récupère des armes.

A partir de l’attaque allemande contre l’URSS, le 22 Juin 1941, le PCF organise la lutte armée en créant l‘Organisation spéciale (OS). À Nantes, elle est mise sur pied par Jean Vigneau-Ballous. Au tout début, à Nantes, cette OS se confond avec les Bataillons de la jeunesse, organisation armée des Jeunesses communistes. Elle sert de logistique aux jeunes communistes venus de Paris exécuter le Feldkommandant Holtz le 20 octobre 1941.

L’exécution des 48 otages le 22 octobre et les arrestations massives de militants communistes obligent à la réorganisation de l’OS et retardent les sabotages.

CHAUVIN Auguste, Henri

Né le 27 février 1910 à Nantes, section de Chanrenay (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique), fusillé le 13 février 1943 à Nantes ; chaudronnier ; militant communiste de Loire-Inférieure ; résistant OS puis FTPF ; Procès des 42.

Fils de Auguste Chauvin, coupeur en fer-blanc et de Jeanne Lechat, ménagère, le jeune Auguste Chauvin devint orphelin à l’âge de quatre ans, son père décéda en 1914 de maladie. Il avait une sœur aînée handicapée. Sa mère prit la place de son père comme coupeuse de fer blanc pour les conserveries. La famille habitait 7 Chemin du Bois Haligand à Nantes. Le jour de ses 13 ans, Auguste Chauvin entra comme apprenti chaudronnier à l’usine « Courtois Delezy à Chantenay. A 16 ans, il fut embauché comme jeune ouvrier à l’usine de locomotives Batignolles-Chatillon (LBC) en 1923, puis trois ans plus tard comme chaudronnier. Il n’avait pas de lien de famille avec Eugène Chauvin, même s’ils travaillaient tous les deux aux Batignolles et habitaient Chantenay. Licencié en août 1929 à cause de la crise, il travailla alors dans diverses entreprises de travaux publics et effectua son service militaire dans la marine en 1931-1932. Réembauché en 1934 aux LCB, il adhéra au Parti communiste en 1936.
Mobilisé comme affecté spécial à Lorient, puis à Guérigny (Nièvre), il revint à Nantes en juillet 1940 et fut démobilisé en janvier 1941. En août 1940, il découvrit un camion chargé de fusils sur la route de Pont-Saint-Martin (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique). Ces armes furent récupérées par Marcel Paul et entreposées chez les Michel à Saint-Sébastien-sur-Loire. Il participa à la réorganisation clandestine du Parti communiste. En août 1941, suite à une distribution de tracts communistes dans son usine, la police nantaise fut chargée de l’arrêter, en vain, et la perquisition de son domicile ne donna aucun résultat. C’est à cette date qu’Auguste Chauvin entra dans la clandestinité avec plusieurs de ses camarades des Batignolles, pour participer, sous le pseudonyme d’Henri Brunelière, aux activités de l’OS, puis des FTP. Le groupe de FTP mené par Raymond Hervé et Louis Le Paih commit de nombreux attentats contre l’armée allemande et les collaborateurs nantais dans les années 1941-1942. Ainsi, en avril 1942, avec Turpin et Le Paih, Auguste Chauvin participa à un attentat contre une ligne électrique et à la destruction du pont roulant de l’usine des Batignolles qui travaillait pour l’Allemagne. Poursuivis activement par les polices allemande et française, la plupart des membres du groupe furent arrêtés.
Auguste Chauvin fut arrêté le 13 août 1942 avec Raymond Hervé par le Service de Police Anticommuniste (SPAC). Le 1er septembre 1942, il épousa en prison Marie-Madeleine Fallourd-Maisonneuve avec qui il vivait depuis 1940 et qui accoucha quelques semaines plus tard de leur fils Jean. Il réussit à lui transmettre clandestinement des lettres lui donnant notamment des nouvelles de ses codétenus résistants espagnols, comme Miguel Sanchez Tolosa. Ces lettres ont été publiées en 2003 par son fils Jean, dans L’ORIBUS N° 58 (http://www.oribus.fr) sous le titre « Lettres d’un héros ordinaire ».
Jugé par le tribunal militaire allemand FK 518 à partir du 15 janvier 1943, dans le cadre du procès dit « des 42 », condamné à mort pour « activités de franc-tireur », il a été fusillé sur le terrain du Bêle à Nantes. À l’issue du procès, il déclara : « C’est un honneur pour un Français de mourir sous les balles allemandes. » Une cellule nantaise du PCF porte son nom. Il fut homologué lieutenant FFI à la Libération et reçut la Légion d’honneur, la Croix de Guerre et la médaille de la Résistance.
La mention « Mort pour la France » lui fut attribuée suivant décision du Secrétaire général aux anciens combattants en date du 14 février 1945.
Son épouse, née le 5 octobre 1903 à Nantes, veuve en 1936 de Camille Maisonneuve dont elle eut deux enfants, travaillait elle aussi aux Batignolles, le couple était domicilié Cité Halvêque , 49e Rue, n°6, . Elle hébergea Léon Mauvais après son évasion de Châteaubriant le 19 juin 1941 et, par la suite, plusieurs autres responsables de la résistance communiste. Pour cela, elle fut traduite devant la « Section Spéciale de la Cours d’Appel de Rennes » le 20 mai 1943 et « relaxée au bénéfice du doute ». Membre du Comité départemental de libération en 1945, Marie-Madeleine Chauvin mourut le 19 octobre 1961.

Pour citer cet article :

https://maitron.fr/spip.php?article19708, notice CHAUVIN Auguste, Henri par Jean-Pierre Besse, Guy Haudebourg, Jean Chauvin, version mise en ligne le 10 mars 2015, dernière modification le 28 décembre 2021.

Auguste Chauvin
La résistance armée communiste

Les Francs-tireurs et partisans (FTP)

En 1942, les membres de l’OS qui participent directement aux actions de sabotage ou aux attentats contre des soldats allemands et des collaborateurs sont regroupés dans quatre groupes : un nantais, deux rezéens et un nazairien.

Leurs responsables inter-régionaux sont Louis Le Paih et Jean Vignau-Balous tandis que Marcel Brégeon est responsable départemental.

Rezé Pont-Rousseau Maurice Lagathu

Robert Douineau
André Guinoiseau
Maurice Jouard
André Rouault
Yves Brisson, chargé de créer un groupe rural, agit alors avec Lagathu

Rezé

Félicien Thomazeau

Georges Barbeau
Albert Brégeon
Marcel Duguy

Nantes

Auguste Chauvin
Auguste Chauvin

André Pérocheau

Auguste Chauvin
Valentin Cléro
Marcel Danigo
Raymond Hervé
Gaston Turpin

Saint-Nazaire

Georges Girard
Guy Lelan
Albert Rocheteau
Ce groupe agit de façon autonome

Parti communiste espagnol

Benedicto BLANCO DOBARRO
Basilio BLASCO MARTIN
Ernesto PRIETO HIDALGO
Miguel SANCHEZ TOLOSA

Les contacts avec le PCF sont effectués par Alfredo GOMEZ OLLERO

Ces militants sont tous issus du PCF et de la JC.

Si, au début de leur action, presque tous conservent leur activité légale, progressivement, à mesure que la traque policière se fait plus forte, certains passent dans l’illégalité. C’est le cas, par exemple, de Raymond Hervé ou de Marcel Brégeon.

Voir photos

Bureau d'embauche
Faits d’armes

LES PRINCIPAUX FAITS D’ARMES DES FTP

La première action authentifiée de l’OS nantaise – après l’exécution du colonel Hotz le 21 octobre 1941 – est la tentative de sabotage d’un pylône électrique, route de Clisson le 29 novembre 1941.

Dans la région nazairienne, les premiers sabotages se situent en avril 1942.

De novembre 1941 à août 1942, date des principales arrestations, la quasi totalité des actions armées menées dans les régions nantaises et nazairiennes et relevées par les autorités françaises sont à porter au compte des groupes de l’OS.

Ces actions sont essentiellement des sabotages.

Attentat contre le bureau de la main d’œuvre pour l’Allemagne, juillet 1942

Bureau d'embauche
Bureau d’embauche

À côté, on relève des attentats contre les « collaborateurs ».

Il faut attendre juin 1942 pour qu’une attaque ait clairement comme but la mort de soldats allemands : l’attentat contre l’Hôtel de la Duchesse Anne.

La traque des terroristes

LA TRAQUE DES « TERRORISTES »

Dès les premiers sabotages, les polices et autorités françaises et allemandes en recherchent activement les auteurs, alliant les mesures vexatoires (amendes, gardes de voies, otages), les exécutions et les promesses de récompenses.

Après les arrestations du début 1941, les sabotages ont nettement diminué.

Un nouveau cap est franchi avec l’exécution du Feldkommandant Hotz (20 octobre 1941). Désormais, les attentats visent aussi les personnes.

La multiplication des actions au début 1942 amène les autorités françaises à intensifier les efforts dans la lutte « anti-terroriste ».

Grâce aux renseignements recueillis (types d’engins explosifs utilisés, procédures, objectifs visés), la police fait des recoupements et surveille de plus en plus étroitement les « milieux communistes ». Dès le printemps, les soupçons se portent sur Raymond Hervé dont le domicile est fouillé par la police française.

Les informations obtenues lors des interrogatoires des premiers inculpés permettent à la police française d’opérer un vaste coup de filet à partir de la fin juillet 1942 auxquels échappent plusieurs FTP de premier plan (Louis Le Paih, Jean Vignau-Balous, Marcel Brégeon, Raymond Hervé, par exemple).

Les méthodes utilisées vont des simples menaces à de violentes séances de torture menées par le SPAC au Commissariat central de Nantes, rue Garde-Dieu, contre ceux qui sont fortement soupçonnés d’appartenir au groupe des francs-tireurs. Le commissaire Fourcade se met entièrement au service du SPAC et répond si bien à ses attentes qu’il est nommé à la direction de l’une des deux sections de ce service en novembre 1942.

Les photos des militants évadés, publiées par Le Phare, sont assez édifiantes quant aux méthodes policières. Les juges allemands justifieront d’ailleurs la torture.

Nantes 1943

NANTES 1943 : 37 RÉSISTANTS EXÉCUTÉS PAR LES NAZIS

Le 15 Janvier 1943, le « Procès des 42 » s’ouvre au Palais de Justice de Nantes. En fait, le Conseil de Guerre de l’armée allemande juge 43 hommes et 2 femmes. Du 15 au 28 janvier 1943, les 45 inculpés sont amenés, enchaînés pour certains d’entre eux, devant la cour martiale allemande présidée par le Dr Hanschmann, le procureur étant le Dr Gottloeb. Seuls peuvent assister aux séances les avocats (Guineaudeau, Lerat, Lauriot, Mouquin et Pascal, aidés du traducteur Duméril), quelques officiels et des journalistes asservis à l’occupant. Une grande partie des entretiens se fait en allemand et le réquisitoire n’est pas traduit aux accusés qui n’ont pu s’entretenir avec les avocats avant le procès.

Membres de l’Organisation spéciale (OS), créée par le parti communiste, ils vont devoir répondre, pendant deux semaines, de 49 chefs d’accusation – allant d’attentats contre l’occupant à l’exécution de « collaborateurs » ou au vol de tickets d’alimentation. Ils savent que leur vie est en jeu.

Le contexte, en effe, n’est guère favorable à la mansuétude des autorités allemandes.

Depuis un an, les actes de sabotage se sont multipliés dans la Basse-Loire, la plupart à porter au crédit de l’OS et le souvenir de l’exécution du Feldkommandant Holz, le 20 octobre 1941, par de jeunes communistes venus de Paris est encore très présent dans les mémoires. De plus, en dépit des nouvelles rassurantes véhiculées par la presse collaborationniste – tel Le Phare -, les combats qui font rage à Stalingrad remettent en cause la suprématie des armées du Reich en Europe.

Enfin, les exactions allemandes de toutes sortes, les réquisitions de plus en plus nombreuses de jeunes pour l’Allemagne, commencent à faire basculer les esprits dans un sens favorable à toutes les formes de résistance.

Aussi, Allemands et collaborateurs de tout poil cherchent-ils à criminaliser les résistants, en particulier les communistes.

D’évidence, les autorités allemandes veulent l’exécution de tous les accusés. Quelque soit le motif initial d’inculpation, 37 accusés sont considérés comme des « francs-tireurs » et condamnés à mort. Trois inculpés de vol sont condamnés à diverses peines de prison. Trois autres sont acquittés, faute de preuves, bien que le tribunal ne les juge pas innocents. Deux d’entre-eux sont d’ailleurs déportés (Roger Guédon et Ernest Le Goff).

La presse collaborationniste exulte.

Les faits, mal éclaircis pour les deux femmes (Renée Losq et Marie Michel) sont renvoyés à un complément d’enquête. Elles sont aussi déportées.

Le 28 janvier 1943, le ministère public allemand est satisfait. Le tribunal à suivi son réquisitoire.

Les demandes de grâce signées du Préfet, du Maire de nantes, de l’Évêque et du Pasteur n’entament pas la détermination des allemands. En dépit du délai de grâce qui va jusqu’au 2 février, dès le 29 janvier, 9 condamnés sont fusillés au terrain militaire du Bêle à Nantes.

25 autres suivent le 13 février 1943.

Les trois derniers sont exécutés le 7 mai 1943.

Alex Auvinet

Le Mans, le 27 mai 1943

Mon cher Oncle, tante et cousine

Voici la sentence prononcée. 13 inculpés, 13 condamnés à mort. Il fallait guère attendre moins. Je crois que nous allons être fusillés demain ou samedi. J’ai fait un paquet avec ma gabardine, mon costume, ma paire de brodequins, mon porte-feuille vide, mais j’ai déposé 2910 francs aux Allemands qui les feront probablement parvenir. Il y a aussi ma montre. Je te fais adresser tout ça à toi, tu prendras ce qui t’ira. Le reste devrait aller aux mains d’Odette qui est à peu près de ma taille. Tu emploieras ma canadienne qui est aussi chez toi et tu récupéreras tout ce qui est chez Lili. Tu en feras ce que tu voudras. Je ne sais pas où l’on va être enterrés mais probablement au Mans ou aux environs. Enfin, l’on te préviendra et, si par la suite, je peux être ramené à Montaigu, cela me fera bien plaisir. Enterrement sans prêtre, évidemment. Tu pourras me reconnaître à ma chevalière en acier et Inox que j’ai au petit doigt de la main gauche et à mes dents en acier également. Il ne faudra pas toutefois que cela te cause des frais et tu te serviras pour ça de l’argent que tu vas probablement recevoir. J’ai également déposé 3.000 francs chez René BAUDRY qui tient un café sur la route des « Sorinières » après Ragon. Tu iras les chercher avec « LILI SORIN »qui est connu là-bas. Tu diras que tu es mon oncle et que tu viens chercher ces 3.000 francs et tu leur expliqueras ce que je suis devenu ; voilà pour mes affaires.

Maintenant pour la vengeance qui, j’espère, arrivera un jour. Voici des noms qu’il ne faudra pas oublier, un nommé L, employé de la SNCF, né au Mans, James ROGIER, Bar-le-Duc, le fameux type qui s’était soi-disant évadé de la prison de Nantes en février. Un ancien camarade qui n’était autre qu’un policier et qui m’a donné à la Police. J’ai été arrêté par la brigade mobile d’Angers par les policiers : SAVIN, BAUDRY, MELGRANI et POUPAERT, GUICHANDU, RIVIÈRE et d’autres dont je ne me souviens pas du nom. Tous des salauds. Tout ceci, tu n’auras qu’à le reporter au parti après la guerre pour le règlement des comptes. Je mets dans la lettre deux autres lettres, une pour maman, une autre pour M et Mme MARTIN de Montaigu. Tu leur feras parvenir. Inutile de prévenir Grand’mère pour l’instant, elle l’apprendra toujours assez vite. Tu préviendras tous mes copains de Coëx, Fernand, La Fruise et Lili et tous ceux que je pourrais oublier. Si quelquefois après la guerre, il y a des oeuvres ou des secours pour les parents de « Francs-tireurs » tombés pendant la guerre, tu voudras bien t’en occuper pour maman. Tout cela paraîtra sur l’Humanité et tu me rappelleras au parti comme le « Franc-tireur AUVINET » qui a lutté depuis le 15 octobre 1942 au 5 mars 1943, date à laquelle je me suis fait prendre au Mans.

Je vous embrasse tous bien fort et faites de la petite « Mimi » qui commence à être une grande fille, une femme intelligente et instruite qui luttera dans la vie comme vous lutterez vous aussi, je l’espère, contre l’esclavage des capitalistes, contre l’exploitation de l’homme par l’homme. Je vous embrasse tous et compte sur toi, « Gaby », pour faire ce que je te demande.

ALEX

Vive le parti communiste ! Vive l’URSS ! Vive la France

Conserve cette lettre comme pièce à conviction.

Automne 42

« AMI SI TU TOMBES »

Les arrestations de l’été 1942 ont totalement décapité l’organisation communiste tant du point de vue militaire que politique.

Dès l’automne 1942, la réorganisation est opérée par la direction nationale du PCF qui désigne René Poirot (Marcel) comme responsable interrégional politique tandis que James Rogier (Jack) devient secrétaire départemental.

Louis Le Paih est aidé par un nouveau commissaire politique interrégional, Camille Lacazette (Victor) qui arrive à Nantes le 5 décembre 1942.

Tous deux chargent Jean Fraix (Roger) de réorganiser rapidement les FTP, ce qu’il effectue, aidé de Fernand Mougenot et de Roger Astic (Coprinus), résistant nantais de la première heure, responsable aux renseignements.

Alex Auvinet (Auguste)

Marcel Boquet (Alphonse)

Joseph Colas (Georges)

Jean Dréan (René)

Guy Lelan (Clément)

Louis Bâle (Dibidon) et Guy Jamet (Guy) font partie de la logistique.

Dès novembre, le groupe est opérationnel et sa première action est un coup d’éclat et un signal d’alarme pour les Allemands. En effet, le 14 novembre 1942, le groupe FTP attaque les Allemands devant le cinéma Apollo, faisant un mort et plusieurs blessés graves.

En deux mois, le bilan est impressionnant.

LE DÉMANTÈLEMENT DU RÉSEAU

Mais ce nouveau groupe est, lui aussi, très vite identifié et démantelé.

Le 12 janvier 1943, Louis Le Paih est appréhendé et les Allemands essaient de le faire parler afin de compléter l’instruction du « Procès des 42 ». Évadé lors d’un transfert en gare de Nantes le 3 mai 1943, il est repris le 5 et fusillé.

Le 17 janvier, Jack tombe à son tour et, après un long interrogatoire, donne de très nombreux renseignements. Jean Fraix est arrêté le 18 et, confronté à Jack, ne peut guère contester les faits. Ce dernier donne les autres membres du groupe qui sont arrêtés, à l’exception d’Alex Auvinet qui s’enfuit au Mans.

Le 13 août 1943, lors du « Procès des 16 », la seconde génération des FTP est jugée par les Allemands en dehors de toute assistance d’avocat français. Onze sont fusillés le 25 août au Bêle et deux le 20 novembre.

Les trois derniers sont déportés. Grâce aux retournements de James Rogier et de Léon Renard, son successeur, les polices françaises et allemandes démantèlent à nouveau les organisations communistes.

Leur succès semble total dans tout le département puisque les « réseaux Buckmaster » du nord du département – réseaux gaullistes en liaison avec Londres – sont eux aussi anéantis.

Mais, dès l’automne, Libertaire Rutigliano réorganise la résistance communiste. Il peut ainsi contribuer à la création du Comité départemental de Libération qui unifie la Résistance ligérienne sous la présidence de Jean-Baptise Daviais, du mouvement Libération-nord.